Blogueur voyage depuis 7 ans : bilan et confidences
5Dans le titre, je parle de sept années, mais en fait, c’est davantage. En effet, j’ai commencé à bloguer avec Instinct Voyageur en 2010. Et encore, ce n’était pas mon premier blog.
Non, le premier traitait de mon expatriation sur Lagos au Nigéria où j’ai vécu pendant un an et demi de 2004 à 2006. Une expérience forte que j’avais eu envie de faire partager avant tout à mes proches. À l’époque, j’avais donc créé sur la plateforme overblog.com un petit blog sans prétention qui, bon, il faut le dire, ne ressemble à rien par rapport aux canons actuels. J’ai même trop honte de mettre le lien ici, vous me pardonnerez.
C’est en 2011 que je suis devenu blogueur voyage pro, autrement dit que la grande majorité de mes revenus est venue de mon activité. Comme vous le voyez, pour moi, bloguer ne date pas d’hier. C’est quelque chose que j’ai dans le sang depuis longtemps. Ce blog de voyage a été le résultat d’un processus qui avait commencé depuis un certain temps. C’est une des raisons, je pense, qui explique son succès. Ce dernier mot se conjugue souvent avec processus d’ailleurs. Dans n’importe quel domaine, on ne réussit pas du jour au lendemain en se disant un beau matin : tiens je vais faire cela !
Sept ans, c’est une période importante dans une vie. Déjà, c’est la première fois que je fais quelque chose sur une aussi longue durée d’un point de vue professionnel. 7 ans, c’est un chiffre symbole en ce moment, je viens de quitter Bucaramanga après sept années également
J’ai voulu ici faire le bilan de ces sept années de blogging. Une grosse tâche tant j’aurais à dire. Je me suis limité car bon, j’aurais pu écrire un livre entier sur le sujet. Et puis, j’imagine que cela n’intéresse pas la plupart d’entre vous. Pas grave, c’est bien d’être égoïste parfois et de se faire plaisir.
Dans cet article, j’ai voulu faire un bilan de sept années en tant que blogueur voyage, parce qu’il me paraît important de partager les choses importantes qui m’ont marquées et les grandes tendances du moment.
- 1. Une complexité… de plus en plus complexe
- 2. L’uniformité grandissante
- 4. De moins en moins de place sous les tropiques
- 5. Blogueurs voyage et blogs trips
- 6. Les débats stériles de la blogosphère
- 7. Les médias
- 8. Moi, vous
- 9. L’éthique au fond du sac à dos
- 11. Le tout vidéo
- 12. La notoriété
- 13. Le blogging, c’est un marathon
- 14. Pour se donner une chance, il faut faire les choses à fond
- 16. Un peu de chance
- 17. Et l’avenir du blogging ?
- 18. Et Instinct Voyageur ?
Une complexité… de plus en plus complexe
Tout se complexifie dans le blogging et Internet, et cela ne s’arrête pas, loin de là. C’est comme une sonde lancée et qui prend de plus en plus de vitesse dans le vide de l’espace, sans s’arrêter, et sans limites.
Lorsque j’ai commencé Instinct Voyageur en 2010, tout était bien plus simple. Un truc de fou quand j’y pense. Pourtant, je débutais alors en autodidacte, ce qui signifie que j’avais une foule de choses à apprendre. Je n’imagine pas la personne qui débute en 2018 dans le blogging, burn-out et migraine assurés. Si j’avais pu me projeter aujourd’hui, j’aurais relativisé les choses à l’époque…
Non, sérieux, à l’époque, la page Facebook du blog se limitait seulement à poster les derniers articles. Et bah, les options n’étaient alors pas nombreuses, et il n’y avait pas encore de publicité. Le reach était alors incroyable. Et cela sans payer, si, si, je vous jure. Ha le pied quand j’y pense ! Dommage que je n’aie pas fait de copies d’écran alors, cela aurait été super intéressant. Cela ferait rêver nombre de nouveaux blogueurs face à la portée actuelle de leur page.
L’introduction de la publicité sur Facebook a entraîné petit à petit (histoire de ne pas effrayer) une baisse du reach naturel afin que vous passiez à la caisse. Devenu accroc, le pigeon était ferré. Depuis, c’est de plus en plus difficile d’engendrer les likes sans payer. Le budget augmente, Facebook devient de moins en moins rentable. Sauf pour leurs actionnaires.
En 2010, il n’y avait pas encore Instagram, ou cela commençait à peine, je sais plus. Pas de Snapchat ni de Pinterest, YouTube en était encore à ses débuts, ou presque.
Quand j’y pense, le réseau social qui a le moins évolué au final, c’est Twitter. Bon, il y a peut-être un rapport avec sa mauvaise santé actuelle.
Les réseaux sociaux sont devenus hyper chronophages. C’est l’une des choses avec lesquelles j’ai le plus de mal. Trop, c’est trop. Vous pouvez faire des vidéos pour Snapchat, ensuite d’autres pour Instagram, une vidéo sur YouTube, et pourquoi ne pas la publier sur Twitter, LinkedIn ? On ne s’en sort plus.
L’uniformité grandissante
Les grandes villes du monde tendant vers l’uniformité, pour les blogs de voyage, c’est le même combat. De toute manière, quel que soit le domaine, l’homme tend toujours vers l’uniformité. Depuis 2010, je peux dire que je vois toujours passer les mêmes sujets dans mon feed Facebook, les mêmes articles et réflexions : « la déprime du retour », « organiser un tour du monde », « les pauvres sont heureux, ils sourient ! », « voyager, c’est fatiguant à la longue », « le voyageur, carte bancaire sur patte », etc.
Bon OK, je sais, rien de plus normal que d’écrire sur son vécu, on est d’accord. C’est juste que comme je suis dans le milieu, cela fait répétition. Mais bon, c’est normal. Par contre, cela manque parfois d’originalité. Certains confondent inspiration et plagiat et les autres ne font que du SEO sans âme.
Et puis, les blogs de voyage, c’est plutôt un monde de bisounours. Je veux dire par là que les articles sont souvent tous gentils, tout doux, sur les destinations ou le reste. Le but, c’est de montrer les belles choses, faire rêver le passant. Certes, c’est important. Mais pour moi, c’est aussi important de montrer les côtés moins glamours des choses.
Je me rappelle d’un article que j’avais publié lors de mon voyage au Guatemala au lac Attitlan. J’y parlais de l’emprise du trafic de drogue local, de la corruption et du fait que certaines guest house appartenaient à des malfrats, du blanchiment d’argent… Et là, dans un commentaire, une lectrice me disait sa frustration de lire ce genre d’article. Elle m’a répondu un truc du style « je suis là pour rêver en vacances, le reste, cela n’a pas d’importance ». J’avais été un peu déçu par cette réaction. Mais je sais que c’est une réalité partagée. Faire bronzette au bord de la piscine de son hôtel cinq étoiles dont la terre a été volée à des Indiens, bah, quelle importance ? L’important est de profiter du paysage et du soleil !
Le pire, au niveau uniformité, c’est Instagram. Pour percer, il faut appliquer les mêmes recettes. Tout d’abord, pas de portraits, les gens likent davantage les paysages. Frustrant. Il semblerait qu’un coucher de soleil fasse plus rêver qu’une belle rencontre. Pourtant, la deuxième est plus enrichissante. Mais voilà, une rencontre, c’est plus « risqué », et surtout on est moins passif, cela nous demande plus. C’est peut-être une des raisons, allez savoir. Personnellement, je préfère une belle rencontre sur fond de coucher de soleil, il n’y a pas à choisir.
Ensuite, sur Instagram, il vaut mieux apparaître sur la photo, de dos, de ¾, de face, en ayant l’air heureux, cela va de soi. On prend la pause, on peut faire un saut par exemple, c’est encore mieux. Bon, je vous la fais court, mais le résultat, c’est que la plupart des comptes Instagram se ressemblent. La preuve a été faite dans cet article sur le sujet. Si tu es belle, c’est un avantage, tu auras plus de likes et de followers, surtout si tu ne t’habilles pas en Mormon. Où est l’originalité ? Nulle part. Ce que j’aime dans la photo, c’est le style, un regard particulier, un traitement original, une approche artistique. Vous ne pouvez pas faire cela sur Instagram, cela ne marche pas. Ou très peu. Et cela va vous demander plus d’efforts et de temps.
Résultat, bah, tout le monde fait plus ou moins dans le même style. Idem sur YouTube. Les vidéos dont les sujets ne sont pas trop consensuels, provocateurs, reçoivent moins de likes. Pire, ils reçoivent des dislikes. Résultat, elles seront moins visibles sur le réseau car l’algorithme tient compte de cela, entre autres. La dictature du like impose une conformité des contenus. Exemple avec ma vidéo sur le polyamour (oui, rien à voir avec le voyage) : un ratio pas terrible de like/dislike en raison du sujet.
De moins en moins de place sous les tropiques
Vous êtes déjà allé sur la plage de la Grande Motte l’été en week-end ? Eh bien, c’est ça le blogging voyage en 2018. OK, j’exagère à peine. Non, mais regardez Google. En 2010, on plaçait facilement une URL sur la première page des recherches sur un mot clef, du moment qu’on maîtrise le SEO In-Page et qu’on bourrine à coup de backlink externe, même sur des sites de mauvaise qualité. Fastoche !
En 2018, c’est beaucoup moins facile, il y a du monde sur la route. Les critères SEO sont devenus bien plus complexes, les backlinks ne sont qu’un critère parmi d’autres. Il faut compter avec l’expérience utilisateur, la vitesse du site, son mobile friendly, les réseaux sociaux, la réputation, et j’en passe… je ne vais pas faire ici un cours de SEO.
Tout cela fait qu’il est de plus en plus difficile d’être visible sur Google. Surtout que celui-ci place de plus en plus son propre contenu. C’est notamment le cas pour ses pages « guides » qui apparaissent souvent en première position. Déjà qu’avant il y avait les liens sponsorisés ! Frustrant pour le producteur de contenus indépendant. Et cela ne va pas s’arranger à l’avenir. En fait, le plus gros concurrent d’un blogueur voyage, c’est Google. Et le pire, c’est que c’est un concurrent dont on est dépendant, dont on est prêt à cirer les pompes… Un comble
On retrouve les mêmes plages bondées sur les réseaux sociaux. Et les reach baissent partout, vos publications sont de moins en moins vues alors que vos nombres de followers augmentent. Décourageant !
Blogueurs voyage et blogs trips
J’ai dû être parmi les premiers blogueurs voyage à faire un vrai blog trip. Le premier, c’était en 2012 je crois, à Philadelphie. Pour ceux qui ne le savent pas, un blog trip, c’est comme un voyage de presse, sauf que c’est pour les blogueurs… quoique parfois, il y a des journalistes aussi. Au début, blogueurs et journalistes étaient mélangés. Les professionnels ont mis un temps étonnamment long pour comprendre que ce n’était pas le mieux à faire, et que ce sont deux activités différentes, deux manières de travailler.
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Lle sanctuaire d’Izmo, le 2ème plus ancien du Japon. #japon #japan #shimane #CHUGOKU_SHIKOKUxTOKYO
Il faut dire que les journalistes en place voyaient et continuent de voir d’un mauvais œil ces influenceurs qui n’ont pas de carte de presse, mon Dieu. Appelons un chat un chat, certains tombaient vraiment dans la bêtise pure. Mais depuis, ces derniers en ont pris de la graine, et il me semble que l’affaire est plus apaisée. À moins que certains soient partis en retraite… Enfin, il y a plus de maturité des deux côtés
Pendant les premières années, c’était très amateur au niveau de l’organisation et du retour sur investissement. J’ai toujours été étonné par les sommes investies et le ROI. J’ai toujours été scotché par le fait de me retrouver invité sur des voyages de rêves à l’autre bout du monde avec mon petit blog. Oui, car même si le trafic est important pour un blog personnel, ce n’est rien comparé aux grands médias. Par contre, l’influence est proportionnellement plus importante. Mais bon, c’est génial de se retrouver aux meilleures tables, dans des lodges de fou. C’est quelque chose que je n’aurais jamais pu rêver il y a 10 ans.
Parfois, je me dis que j’aurais dû créer une société de marketing. Il suffit de montrer des chiffres, d’avoir un joli discours tendance, d’enrober les choses et voilà, c’est pesé, vendu. Seulement moi, je ne viens pas d’une école de commerce, j’ai trop de scrupules. Ce qui est dommage, même encore maintenant, c’est qu’il y a peu de feedback sur le travail, aucun suivi ensuite. Du grand n’importe quoi. De nos jours, il y a de l’amélioration, mais il y a encore de l’éducation à faire.
Beaucoup de jeunes blogs se focalisent sur les blogs trips pour leur modèle économique. Leur but est de vendre du contenu, notamment au niveau vidéo auprès des OT. Très bien, le résultat est beau il faut le dire. Le hic, c’est que toutes les vidéos que vous voyez se ressemblent. Du coup, de plus en plus dur de se distinguer, c’est le formatage des réseaux sociaux ! Certains sont d’ailleurs plus des boîtes de communication que des blogs voyage. Allez qui avoue dans la salle ? J’ai les noms !
Certains ne peuvent envisager un voyage perso. Oui, vous savez, un voyage que vous payez de votre poche, un voyage où vous êtes vraiment libre, où vous allez où vous vouliez, où vous écrivez en toute liberté. Certains vont vous répondre « ha pourquoi faire ? » No comment !
Eh oui, pas de billet d’avion payé, pas de voyage ! Et une fois sur place, c’est la course contre la montre. Il faut rentabiliser l’influenceur à tout prix.
Et que dire quand il y a tout un groupe, genre colonie de vacances ? Vous visitez un musée au pas de course, tout le monde s’arrête 2 mn devant une œuvre pour facebooker, instagrammer, etc. Ça vous fait rêver ?
Alors oui, j’avoue, il m’arrive de faire des blogs trips. Mais la chose est rare, c’est un choix et cela reste une minorité dans mes voyages. Ceux que j’accepte, c’est parce que je ne connais pas la destination et qu’elle demande du budget ( Australie, Japon en 2017, en 2015) ou qu’elle est confidentielle (La Dominique en 2014, la Zambie en 2015). Voilà, vous avez là l’essentiel de mes blogs trips de ces dernières années.
Il faut dire que les pays qui ont le budget pour inviter des influenceurs ou des blogueurs voyage, ils ne sont pas si nombreux que cela. En gros, nous avons l’Europe de l’Ouest, l’Amérique du Nord, l’Australie, et quelques pays d’Asie. Le reste, c’est anecdotique. Résultat : c’est la grande aventure pour les blogueurs voyage. Il suffit de regarder leurs destinations, en général, elle est très liée aux blogs trips. Beaucoup d’Europe ou de destinations touristiques.
Au final, c’est toujours la même chose.
Hum, mais voyager n’est-il pas s’écarter des sentiers battus, découvrir par soi-même, suivre ses envies ?
Je suis bien conscient que j’y vais un peu fort. Il est vrai que lorsque vous avez 20 ans et que vous n’avez jamais voyagé, se faire inviter pour un city trip à Bruxelles, c’est déjà super. J’aurais été à leur place à l’époque, j’aurais été emballé aussi.
Le truc, c’est que j’ai commencé mon blog de voyage en 2010, j’avais alors 33 ans, et comme Jésus, j’avais déjà un peu roulé ma bosse ici et là. En fait, je vais vous avouer un truc, je n’ai jamais pensé devenir blogueur voyage. Oui car tout simplement, à l’époque, cela n’existait pas. J’ai créé mon métier, et je fus un des premiers Français à le faire à plein temps et à en vivre. J’ai peut-être même été le premier.
Au début, mon but était surtout d’avoir la liberté de voyager et de vivre où je voulais. D’être un digital nomade quoi. J’aurais pu créer un blog sur la culture de tomates si cela avait été ma passion. Mais non, (heureusement), mon trip, c’est le voyage. Bon, il est vrai, c’est un peu plus facile que la culture de tomates. Je n’ai jamais pensé ou voulu être payé pour voyager.
En fait, vous n’avez pas besoin de cela. Oui, vous pouvez simplement partir plusieurs mois entre deux CDD. Tout simplement. Si vous habitez une grande ville, et à plus forte raison dans la capitale, trouver du travail en dessous d’un certain âge, dans certains domaines, ce n’est pas très difficile. Et au final, c’est plus simple que d’essayer de vivre d’un blog de voyage pour pouvoir voyager, c’est moins de contraintes. Les mois de voyage que vous ferez, eh bien, là, vous serez complètement libre.
Vous débutez dans le blogging voyage ? J’ai un conseil : fuyez les blogs trips, surtout ceux en groupe. Démarquez-vous des autres, de la masse… toujours.
Les débats stériles de la blogosphère
Cela s’est un peu calmé ces dernières années, ça serait presque dommage. Ha, je me souviens avec nostalgie d’un Piotr, un des meilleurs trolls du coin. Il semble avoir pris sa retraite. Tout va mal, ma bonne dame.
L’être humain est incroyable. Il faut toujours qu’il essaie de s’opposer aux autres. Ce serait la fin du monde et il ne resterait que 3 personnes et une bière sur une île déserte qu’ils trouveraient le moyen de se battre entre eux.
Même dans une petite communauté comme celle des blogueurs voyage, bien sûr, il y a des clans, des groupes etc. L’humain est pathétique parfois. Et si vous n’êtes pas dans un groupe, vous êtes contre tout le monde, ou on vous met d’office l’un d’eux. Cela rassure les gens de mettre des gens dans les cases. Mais je n’aime pas être dans une case.
Depuis le début, j’ai toujours refusé ce postulat et de devoir choisir un camp. Il faut dire que je suis assez solitaire de nature, et surtout, je ne suis pas trop « groupe » et esprit corporatiste. Je ne dis pas que c’est bien, cela a ses inconvénients, mais c’est ainsi.
Cela dit, je vois encore des articles passer avec des avis sur ce que doit être un blog de voyage, comme s’il existait un texte sacré de la chose.
Au début, je me souviens des critiques de ceux qui condamnaient ceux qui parlaient d’un service qu’ils appréciaient. Pour eux, c’était pactisé avec le diable. Or, ce sont les mêmes qui partaient tous frais payés vanter les mérites d’une destination. Cherchez la contradiction. Pour moi, c’est pareil, pas de différences
Moi, ce qui me dérange dans ces écrits, c’est que les gens parlent en fonction de leur vie sans penser à prendre du recul et à se mettre à la place des autres. Par exemple, beaucoup de blogueurs ont un boulot « normal » à côté, leur blog est accessoire. D’autres ont leur partenaire qui assure les rentrées d’argent du foyer. Du coup, forcément, ils ont plus de liberté dans le contenu, ils n’ont pas de chiffre à faire pour payer les charges, tout du moins la pression est moins grande. C’est chouette, ce n’est pas un jugement. Mais ceux qui en vivent comme moi, oui, on est obligé parfois de faire des articles sponso, de l’affiliation, de vendre (ouh le gros mot !).
C’est sympa quand doudou paye le loyer. Je suis d’accord. Mais perso, je suis plutôt dans la position contraire.
Je me souviens notamment de ma rencontre avec une blogueuse il y a quelques années. Elle voyait d’un mauvais œil ces blogs, comme le mien, qui avait la prétention d’en vivre. J’avais bien compris que j’avais une approche trop marketing pour elle. Bon pourquoi pas ? Son argument aurait été recevable si elle n’était pas entretenue en partie par son compagnon. Je trouvais déplacées ces critiques, elle avait oublié non seulement sa situation de nantie mais aussi de se mettre à la place de l’autre. Nous faisons tous cela, hein ?
En fait c’est un peu le mythe de l’artiste qui doit être pauvre et vivre de rose et d’eau fraîche. Le voyageur, pour certains, il est forcément bohème, limite vagabond. Il est vrai que pour certains, il y a même cette course à celui qui dépense le moins en voyage. Comme si c’était un but, comme si la qualité d’un voyage était inversement proportionnelle au budget. Les mythes ont la vie dure.
Je vais vous dire un truc, la grande majorité des blogueurs voyage qui font cela à plein temps, ils sont dans une de ces situations : ils vivent chez leurs parents, la compagne ou le compagnon a un bon job, ils ne payent pas le loyer, ils complètent par les ASSEDIC, ils ont un boulot normal à côté ou plusieurs boulots ou ils ont eu un héritage.
Les médias
Les médias ne se sont intéressés aux blogueurs et influenceurs voyage que sur le tard. 2016 a été l’année la plus médiatique de ce point de vue. En effet, Envoyé Spécial y a consacré un sujet, Capital aussi, et j’en oublie pas mal.
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Comme d’habitude avec la télé, dès qu’un sujet est traité par une émission d’importance, subitement, tout le monde veut en parler, cela devient à la mode. Et comme d’habitude, c’est souvent avec un train de retard, et trop tard pour celui qui veut se lancer. Enfin, trop tard, j’exagère, mais je veux dire par là que lorsque les médias parlent à tout va d’un sujet, c’est qu’il est souvent trop tard pour s’y intéresser en tant qu’acteur. On l’a bien vu avec le Bitcoin à la fin de l’année passée. Cela a amené plein de nouveaux investisseurs qui ont acheté au plus haut avant la baisse… Une confidence, si vous voulez réussir dans un domaine, trouver le secteur dont les médias ne parlent pas encore. Et là, avec un peu de chance, c’est bingo.
Bref, cela reste une bonne chose pour moi cette médiatisation. C’est juste que le traitement du sujet a été bien souvent moyen. Bon, c’est la télé, et comme souvent, les sujets sont un peu polémiques, racoleurs, vous voyez. Par exemple, le sujet de Capital s’est focalisé sur le « voyager gratuit », ce qui est extrêmement réducteur. Et en fait, le reportage donnait plutôt l’impression de personnes profitant du filon juste pour voyager gratuit sans faire grand-chose. Enfin ! On ne peut pas attendre grand-chose du journalisme télé. Pour tout vous dire, j’ai été contacté plusieurs fois pour ces sujets, mais j’avais un profil trop « professionnel » et donc peu représentatif et sans doute moins sexy. No comment.
Moi, vous
Une des choses les plus chouettes dans cette activité, c’est le rapport avec les lecteurs et la communauté, et cela d’autant plus que l’on passe beaucoup de temps devant un ordinateur. Je veux dire par là, que le côté relation sociale est limité, ce n’est pas comme si vous aviez un « vrai boulot » avec des collègues et tout.
Ainsi, quel plaisir que de rencontrer, en voyage ou en France, des lecteurs ! Quel plaisir de recevoir des messages pour me dire simplement que j’ai été une pierre dans l’édifice qui les a conduit à changer de vie ou à partir autour du monde. Le deuxième entraînant parfois le premier. Avoir eu un impact sur la vie de certains, oui, c’est vraiment chouette. Oui, c’est assez égocentrique, mais là, je trouve que c’est dans le bon sens.
C’est pourquoi j’aime autant le Digital Nomad Starter, l’événement que je coorganise depuis 2017. Passer une journée avec des profils différents, des personnes chouettes et qui veulent tracer leur route, c’est vraiment super motivant. Et lorsqu’ensuite vous recevez des retours de leurs aventures, c’est encore plus top !
J’en ai déjà parlé, j’en remets une couche : le Digital Nomad Starer Édition 2018, c’est le 15 septembre prochain à Paris. Infos et billets sur cette page.
Il ne reste que 5 places !
Bien sûr, il faut se taper des trolls parfois, vous savez ceux qui posent un commentaire bête et méchant et qui n’oseraient jamais vous le dire en face. Ils font partie de l’ADN d’Internet, c’est ainsi. J’ai de la chance, je n’ai jamais été trop touché au final, peut-être car dès le début, j’ai toujours été clair sur mes intentions et le but de ce blog.
Cela dit, sur certains articles, j’ai parfois eu des commentaires pas tendres. Je me suis aperçu que lorsque vous exprimez une opinion bien tranchée et personnelle, vous n’êtes pas à l’abri de ce genre de réactions. Or, c’est le propre d’un blog personnel d’exprimer des avis et des pensées basés sur votre vécu, et qui ne sont pas objectifs par définition. Je ne suis pas un journaliste. Le truc, c’est que dans ce cas, certaines personnes interprètent l’article selon leur grille de lecture personnelle qui est basée sur leur vécu, leurs expériences, leurs blessures, etc. Et parfois, les propos sont déformés et tirés de leurs contextes. Je crois qu’en psychologie, on appelle cela un biais cognitif. Et parfois, le propos est d’autant plus fort qu’il renvoie à une mauvaise expérience.
L’éthique au fond du sac à dos
Comme dans tous les domaines, il y a des dérives, du moins il y en a eu. Heureusement, je trouve que c’est assez rare. En effet, difficile de faire croire que l’on voyage si… on ne voyage pas.
Ces dernières années, il y a quand même eu un blogueur sac à dos qui a décroché le pompon. Il est vrai qu’il avait confondu inspiration et plagiat. Et cela à tous les niveaux : blog, réseaux sociaux, livres. Il avait atteint un stade industriel. J’avais bien tenté de lui expliquer via Skype, mais il ne semblait pas comprendre. Je me suis dit que le cas était désespéré. Et il l’était…
Que ce soit par fainéantise ou par manque de créativité, ce n’est pas excusable. Pauvre bougre, pour en être réduit à cela et ne pas en avoir conscience, il doit vivre dans une autre réalité. Paix à son âme.
Je vous rassure, la chose est rare. Difficile de mentir sur le voyage. Et finalement, je trouve que la blogosphère est plutôt saine.
Le tout vidéo
La vidéo s’est finalement imposée sur tous les réseaux sociaux. Je dis finalement, car depuis 2010, chaque année je voyais des articles du genre « la révolution vidéo en marche ». Elle a mis du temps.
C’est un passage obligé pour percer désormais. La vidéo doit être belle et courte. En fait, plus c’est court, mieux c’est. Plus c’est simple, mieux c’est partagé. Surtout, pas de message trop philosophique, de vidéos qui donnent à réfléchir. L’utilisateur ne suivrait pas. Son temps de cerveau est réduit et à vrai dire, on pourrait croire que ses neurones tendent à ne pas suivre.
C’est l’évolution actuelle. Sous le flot d’informations que nous connaissons, notre esprit a de plus en plus de mal à se concentrer.
Il y a en gros deux styles de vidéos voyage chez les blogueurs voyage :
- Les vidéos à l’humour potiche. Le public est forcément jeune, mdr est le maître mot. C’est sympa, au risque que le blogueur tombe dans la caricature de lui-même.
- Les belles vidéos destinations. Une série de belles images dignes d’une publicité pour Chanel. Mais pas de messages derrière. OK, ce n’est pas le but.
Vous devez en voir passer sur votre feed Facebook, et ce n’est pas près de s’arrêter.
La notoriété
Certains gros blogueurs donnent l’impression d’être toujours en représentation, même entre collègues, c’est assez fou. Sourire Colgate ou bruncing parfait au gel (à se demander si le gars n’attrape pas une crampe de la mâchoire à la fin), il serre les mains à tout va. Faut se détendre mec. Et puis, je trouve que cela fait faux. Mon avis est qu’il sort peut-être d’une école de commerce.
Bon, la plupart sont plus simples d’approche, plus naturels et faciles d’accès, rassurez-vous.
Un risque d’avoir la grosse tête ? Cela peut ou a dû arriver à certains, plus jeune sans doute, avec moins de recul. Étonnant, je me demande comment cela peut être possible. Oui, c’est super agréable quand on vous reconnaît à la terrasse d’un café, quand les médias vous contactent, quand vous rencontrez même des lecteurs en voyage. C’est génial, il faut bien le reconnaître, une petite notoriété, même dans un microcosme, c’est un super massage pour l’ego.
Le blogging, c’est un marathon
Si vous souhaitez vivre de votre activité, il y a des moyens plus faciles et rapides sur le net. Clairement. Blogger demande du temps, c’est très chronophage et complexe. Il faut un certain temps, parfois long, pour que vos efforts portent leurs fruits. C’est un peu comme s’il fallait gravir un sommet pendant des heures avant d’arriver sur un plateau bucolique où vous n’avez plus à forcer, où vous pouvez même parfois arrêter de pédaler un temps. Mais bon, il faut reprendre à un moment donné.
Donc, si vous êtes du style à ne penser que résultat immédiat et rapide, le blogging, ce n’est pas pour vous.
Pour se donner une chance, il faut faire les choses à fond
Bien sûr, pendant un temps, vous pouvez tout à fait mener de front le blogging et votre activité salariée. Mais à un moment, si vous souhaitez passer à la vitesse supérieure, si vous souhaitez réussir, il va falloir faire les choses à fond. Il n’y a pas de secret, c’est une loi universelle qui s’applique à toutes les choses importantes dans la vie.
C’est ce que j’ai fait en 2011.
Un peu de chance
Il faut toujours un peu de chance pour réussir des choses. La mienne a été de lancer mon blog au bon moment, en 2010, à une période où le blogging débutait vraiment et où il n’y avait pas vraiment de blog de voyage avec l’approche qui était la mienne. La plupart des blogs étaient attachés à un tour du monde et ils mourraient d’eux-mêmes lors du retour en France. Ce n’était pas des blogs de conseils pratiques et bien sûr, il n’y avait pas d’objectifs derrière.
Pour ma part, à l’époque, je souhaitais créer un blog de voyage qui allait durer, me suivre au cours de ma vie afin de partager mes voyages, afin d’inciter plus de gens à faire un break dans leur vie et à partir autour du monde.
Alors oui, j’ai eu la chance d’être dans le bon timing. En même temps, je l’ai créée cette chance en passant à l’action. Je crois que l’essentiel est là… c’est à vous de créer votre chance.
Et l’avenir du blogging ?
Comme je n’ai pas de boule de cristal avec moi, je ne vais pas écrire un roman sur le sujet. J’ai juste envie de vous partager des réflexions et quelques avis.
Cela fait des années que j’entends parler de la mort du blogging. Il n’y a rien de plus faux. Enfin, il faudrait s’entendre sur les mots. Pour moi, le blogging n’est pas attaché au blog WordPress traditionnel. Non, le blogging, c’est le fait de partager un message personnel autour de soi sur Internet, tenir un journal numérique, quelque soit la plateforme.
Une page Facebook, un compte Instagram, c’est du blogging au final. Il y a la base : les articles, la publication chronologique, l’interaction avec sa communauté, les vidéos et photos, etc. Bref, les plateformes de blogging se sont multipliées. C’est tout le contraire d’une mort annoncée.
Et en fait, je suis convaincu que c’est une tendance de fond tout cela. S’exprimer, partager son point de vue ou autres choses, c’est quelque chose inscrit dans la durée.
Alors, oui, réussir avec un blog traditionnel, en 2018, c’est devenu bien plus compliqué. On est d’accord. Et percer sur les réseaux sociaux devient plus difficile aussi. Il n’empêche, le blogging est loin d’être mort. Il a juste évolué.
D’autre part, je crois dans des contenus de fond. Si le contenu sur le Net est de plus en plus express, court, voire superficiel, il existera toujours une place pour du contenu de fond, de réflexion, etc. Tout comme il y a de la place pour France 5 et Arte à la télé. Certains font du TF1, d’autres du Arte, il y a de tout.
Bloguer demande en 2018 bien plus de compétences, de savoirs, de temps, d’efforts et d’argent qu’en 2010. La différence est énorme. Et cela en reste encore plus passionnant.
Et Instinct Voyageur ?
Celui-ci existera-t-il encore dans 7 ans ? Sans doute. Serais-je toujours blogueur voyage ? Je ne sais pas, je ne peux le dire avec certitudes.
Depuis deux ans, j’ai des doutes et des interrogations sur la suite. L’impression de tourner un peu en rond, une baisse de motivation, un désir de se renouveler, de faire autre chose. J’en parlais ici.
Il ne faut pas non plus s’accrocher pour s’accrocher. De toute manière, il est toujours difficile de changer, car c’est une prise de risques, mais aussi une remise en cause de sa propre identité. Blogueur voyage, je le suis depuis 7 ans, et cela fait partie de mon identité. Je suis reconnu et connu pour cela. Ce n’est jamais évident de faire table rase, et ce n’est pas ce que je souhaite.
C’est pour cela que je passe moins de temps sur mon blog. J’ai consacré de l’énergie ailleurs, dans un projet immobilier en 2016, par exemple.
Allez, peut-être que je referais un article dans 7 ans. Diantre, je ne sais pas s’il faut me le souhaiter à vrai dire. Si allez, quand même !
J’attends vos commentaires si le sujet vous intéresse. Curieux d’avoir votre retour !
Génial comme article ! Ça confirme ce que je pensais et en même temps j’ai appris pas mal de choses.
J’ai commencé mon blog voyage en 2018. Je me rends bien compte que ce n’est pas facile de percer.
Du coup je viens de commencer un autre blog sur un sujet complètement différent qui a infiniment moins de concurrence (et que je ne dévoilerai pas dans ce commentaire pour ne pas prendre le risque de voir des concurrents arriver^^).
Hâte d’être au 15 septembre pour le Digital Nomad Starter !
Ha cool, tu viens le 15 sept donc :-). Hâte d’y être !
Ton article est rafraîchissant et il fait du bien.
L’impression de se poser un instant et de faire le point sur le monde du voyage, mais aussi et surtout sur notre société d’aujourd’hui. Finalement, il y a un air de vérité qui flotte tout au long de ton texte, et tous les filtres Instagram ne pourront pas remplacer cela.
Merci d’avoir pris le temps de partager tes ressentis!
Excellente analyse et réflexion. J’adhère pas mal à tout ce que tu as décrit. Ayant commencé dans le blogging encore plus tôt que toi (1er blog était sur Hawaii en 2007), je ne peux que confirmer que c’est devenu beaucoup plus difficile.
À l’époque, il était facile et rapide de créer une communauté pour suivre le blog (les réseaux sociaux n’avaient même pas vraiment commencé encore) et d’arriver en première page sur le moteur de recherche de Google. En 2014, on a lancé Vivre.auMexique, et là c’était déjà un peu plus complexe avec le SEO, les backlinks, le plagiat, de vautours, etc. Ça s’est bien passé en général, mais la quantité de contenu sur le web relié aux voyages a tellement augmenté depuis, sans compter les algorithmes et les réseaux sociaux, que je trouve qu’il y a beaucoup de bruit, beaucoup plus de difficulté d’obtenir de la visibilité, de se démarquer, etc. Énormément de travail pour…pour quoi au final? Des pinottes, comme on dit chez moi. Ce fut une belle aventure que de bloguer, mais je dois avouer que je suis contente d’avoir arrêter tout ça! 🙂
Maintenant, je préfère suivre quelques blogs et ne plus me préoccuper du travail derrière tout cela. Si j’avais un conseil à donner à quiquonque qui veut se lancer dans le blogging (au sens large), ça serait de déterminer d’abord son objectif. On ne blogue pas si on ne sait pas ce qu’on attend de cela. Si c’est d’en vivre, vaut mieux trouver un emploi de salarié 😉
Il est certain que le ROI a bien baissé, du moins pour un blog.
Mais il reste d’autres sources d’acquisition plus efficace.