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IVCAST 44 : Les mémoires d’un Vice-Consul en Colombie

Jean-Michel Chaupart vit depuis plus de 40 ans en Colombie. Il a été Vice-Consul honoraire de France pendant 18 ans. Retour sur cette fonction et sur ce que peut faire une Ambassade pour les voyageurs en cas de soucis. 

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A propos de cet épisode :

J’ai rencontré Jean-Michel à Bucaramanga quand je suis arrivé pour la première fois en Colombie…en 2011. Déjà. Il était alors Vice-Consul honoraire de France, fonction qu’il a été exercé avec dévouement pendant 18 ans.

Je le retrouvais souvent lors des vernissages d’exposition à l’Alliance Française. A un moment, je vivais juste à côté. Pratique pour les petits fours et le vin. 🙂 Bon, depuis, je suis moins assidu.

Il faut dire que c’est surement le lecteur le plus fidèle du blog dans ce coin du monde :-).

Je suis très heureux donc de tendre le micro à Jean-Michel, il a eu une vie très riche, il a beaucoup d’anecdotes et d’histoires à raconter comme vous l’imaginez.

Je souhaitais aussi lui poser des questions quand au rôle de l’Ambassade Française vis à vis des voyageurs. Et les devoirs de ces derniers. 

 

 

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Liens en rapport avec l’épisode :

– Les services aux Français de l’Ambassade Française en Colombie.

 

Transcription texte

Fabrice : Bonjour à tous. Bienvenus pour ce nouveau podcast « Instinct Voyageur » et je suis aujourd’hui avec Jean-Michel Chaupart. Bonjour Jean-Michel.

Jean-Michel : Bonjour Fabrice.

Fabrice : Alors Jean-Michel, tu es un jeune retraité puisqu’il n y a pas longtemps, tu étais vice-consul, c’est ça ?

Jean-Michel : Oui, mais c’est-à-dire je suis retraité de l’enseignement depuis déjà fort longtemps et retraité de vice-consul honoraire il y a un an et demi.

Fabrice : Voilà. Mais, c’est mieux de vous présenter comme ça. C’est mieux. Donc, justement, je voulais te poser des questions un peu par rapport à tout ça, à ta vie ici en Colombie, par rapport à cette fonction que tu as exercé pendant longtemps de vice-consul par rapport au rôle de l’ambassade, etc. Une ambassade plutôt. Première question, ça fait longtemps tu as été vice-consul pendant longtemps c’est ça ?

La vie en tant que vice-consul honoraire

Jean-Michel : Depuis septembre 1997 et ça a duré jusqu’à novembre 2015.

Fabrice : Donc, à Bucaramanga.

Jean-Michel : Oui, à Bucaramanga. Mais précisons bien vice-consul honoraire.

Fabrice : C’est quoi ? Ah oui d’accord. Justement faisons la différence entre vice-consul et vice consul honoraire.

Jean-Michel : Il doit y avoir des vice-consuls généraux, des consuls adjoints, il doit y avoir des vice-consuls, qui eux, sont nommés par la France, par le ministère des affaires étrangères et qui sont dispatchés dans des ambassades ou dans des consulats. Maintenant, au niveau de certains pays, en fonction de la population de résidants français qu’il y a dans le pays, on cherche à nommer des vice-consuls honoraires et le plus souvent là où il y a un port dans la mesure où certains bateaux de guerre viennent accoster donc en Colombie, à Santa-Marta ou à Carthagène et à ce moment là, le consul a une fonction de réception de ces bateaux de guerre. Alors que de toutes les façons l’ambassadeur et le consul général vont également à l’escale.

Fabrice : D’accord. Mais un vice-consul honoraire, ce n’est pas un fonctionnaire ?

Jean-Michel : Ah non, ce n’est pas un fonctionnaire. On est nommé un peu en fonction du temps de résidence dans la localité, en fonction de la profession que l’on exerce et des connaissances que l’on peut avoir sur le lieu de résidence. Et le plus souvent, la France cherche des hommes d’affaires, des gérants d’entreprise. C’est le cas par exemple en Colombie, à Cali, à Medellin, à Pereira. Ce sont des gens qui sont donc propriétaires d’entreprise, qui sont très connus dans leur milieu, qui disposent de moyens financiers, qui à un certain moment, leur permettent de faire des activités consulaires. Alors que dans mon cas, étant salarié, j’avais certainement moins de moyens pour pouvoir offrir des services festifs aux français de la région.

Fabrice : D’accord. Bon, si t’es chef d’entreprise. Enfin, c’est une fonction qui demande du temps aussi.

Jean-Michel : ça demande du temps mais par exemple, celui qui est à Cali, lui avait embauché un secrétaire à mi-temps, qui était la personne qui s’occupait vraiment des situations des français dans la circonscription de Cali. Alors que lui, il voyage énormément et ne s’intéressait qu’aux grosses affaires quand il y en avait.

Fabrice : Heureusement que tu n’as pas de secrétaire.

Jean-Michel : Non, moi, c’était moi qui faisais tout. Je devais soi-disant avoir un bureau à l’alliance française. Bon, il n y avait aucune possibilité de bureau, puisqu’il n y avait pas d’espace. J’avais un point postal, où je recevais le courrier et où j’avais le téléphone de l’alliance, où on arrivait à me localiser pour une situation. Mais, je n’ai jamais eu de secrétaire. Et je n’ai jamais eu de bureau officiel.

Fabrice : Et alors, tes journées. Enfin, cette fonction consiste en quoi exactement ? Quels sont les prérogatives d’un vice-consul ?

Jean-Michel : La prérogative…

Fabrice : Pas grand-chose…

Jean-Michel : En réalité, bon c’est-à-dire, le fait d’être nommé vice-consul, c’est la Colombie qui m’a donné son accord. Donc, on est au niveau des autorités locales, on est le représentant de la France auprès du gouverneur, auprès du maire auprès de l’autorité miliaire, auprès de l’archevêque. Si parfois, on a besoin d’un service, on a quand même accès facilement à ces personnes là. Maintenant aussi, ça donne l’occasion de boire du wiski ou un verre de vin supplémentaire, lors de réunions, de fêtes. Bon, enfin, sans plus. Et alors bien sûr, il faut s’occuper des français. Il y a des français résidants, on arrive plus au moins à les connaitre, puisqu’ils sont inscrits sur la liste des français résidants à l’étranger. Ils sont inscrits sur la liste de Bogota. Et ensuite, les français de passage. Alors, il y a des français de passage qui ont besoin d’informations, il y en a d’autres qui malheureusement se voient mis dans un truc d’accident. J’en ai eu deux ou trois. Alors, on les retrouve à l’hôpital, on va les trouver dans une clinique, à ce moment là, il faut essayer de voir qui ils sont, où est leur famille, comment fonctionnent leur assurance. Et avec ça, ma foi, on donne beaucoup de nous-mêmes.

D’autres, malheureusement, viennent ici avec des intentions qui ne sont pas très claires. Nous avons eu par exemple il y a cinq, six, sept huit ans un français qui a arnaqué mon collègue de Cali, en lui laissant un chèque qui n’était pas donc valable. Il a remis ça à Medellin, à Bucaramanga, il m’a téléphoné, mais je ne l’avais pas rencontré, il était en option coach surfing avec des étudiants ici de l’université. Puis, après 15 jours de résidence, il a porté appareil photo, ordinateur et tout ça et il a disparu dans la nature. Bon, la France ne pouvait rien faire. Ce n’est pas la France qui va dénoncer à la police un français qui fait une bêtise en Colombie. C’est un problème de police colombienne et pas un problème de police française. Ce monsieur a du repartir on ne sait trop comment. Dans certaines régions et ça ne m’est jamais arrivé à Bucaramanga, il faut aller rendre visite à d’éventuels prisonniers. Heureusement, il n y en a pas beaucoup. Enfin, ceux qui…

Fabrice : Déjà, il n y a pas beaucoup de français dans cette région-là.

Jean-Michel : Dans Bucaramanga non, mais enfin, moi, ma circonscription c’était Bucaramanga et autour, grosso-modo avec les binationaux, c’était 100 ou 110 français. Mais, enfin, on n’a pas eu d’ennuis de ce côté-là. Enfin, le consul à Bogota ou le vice-consul à Cali ont du se présenter à la prison pour rencontrer certains prisonniers qui étaient là pour voir comment ils pouvaient faire suivre les courriers vers la France, comment ils pouvaient en recevoir. Et puis avec leurs avocats, essayer de donner un petit coup de main pour faire avancer l’affaire. Bien sûr la plupart les prisonniers qu’il y a eu et qu’il peut y avoir encore et bien c’est des problèmes de drogues.

Fabrice : D’accord. Mais sinon, l’essentiel de ton travail j’imagine ça consistait à renseigner les expatriés sur les mariages, sur les passeports, sur l’inscription en liste électorale.

Jean-Michel : [rire] C’est très bien de mentionner le mariage, là avec internet, avec internet, on a eu une vague de mariage franco-colombien à partir de 2004, 2005.

Fabrice : Oui les colombiens ont la cote

Jean-Michel : Les colombiens ont énormément la cote. Donc il y a eu énormément de mariages. Alors, là c’était assez particulier parce que certains se mariaient sans passer par le consulat à Bogota, ou sans informer qu’ils allaient se marier. C’est-à-dire pour la publication des bans comme cela se fait en France, à la mairie donc du résident en France et à l’ambassade. Et alors, on a trouvé des situations cocasses. Disons, le consulat à Bogota a fait divorcé deux ou trois couples, voire plus, qui s’étaient mariés sous la loi colombienne, mais qui n’avaient pas suivi donc le processus français. Ils les ont fait divorcer pour ensuite les faire se remarier. Bon… Ensuite, il y a eu des situations où les jeunes mariés devaient se présenter à Bogota pour une interview avec le consul ou la consule. Alors, c’était une interview séparée et alors par exemple, il y a des moments où ils ont demandé l’annulation du mariage dans la mesure où cela ressemblait à un mariage blanc ou à une espèce de situation particulière surtout avec les îles : la Guadeloupe, Martinique, Saint-Martin, Saint-Barth dans la mesure où il se pouvait et cela a été confirmé que certaines dames qui se trouvaient dans ces îles là étaient des prostitués, et qu’un français local épousait pour éventuellement leur permettre de sortir de Colombie.

Les mariages dans le parcours d’un vice-consul

Fabrice : D’accord. Je vois qu’au cours de ces 18 années, tu ne t’es pas ennuyé aussi des fois. Tu peux avoir des trucs assez marrants, assez drôles des fois.

Jean-Michel : Des trucs assez marrants. Mais enfin, l’époque des mariages, surtout là en 2005, 2008, 2009. C’était vraiment la folie. C’est-à-dire par exemple… Bon à l’ambassade, ils ont le droit de marier deux français qui sont résidents, qui seraient résidents en Colombie ou un français qui vient visiter sa copine. Les français peuvent se marier à l’ambassade. Mais, la France ne pouvait pas marier un colombien et un français. Donc, cela dépendait de la loi colombienne devant un notaire ou à l’église et ensuite de l’église qui enregistrait ce mariage civilement. Donc, les gens venaient ils se connaissaient par Internet, les français pouvaient venir. Mais les colombiennes qui devaient obtenir un visa n’obtenaient jamais ce visa pour voyager en France, pour aller voir éventuellement l’entourage dans lequel elles allaient vivre, la famille, les amis, et c’était donc interdit de séjour en Europe.

Il n y avait pas de visa parce que la France et les autres pays européens supposaient qu’une fois que la personne aurait le visa, elle allait certainement rester en France illégalement. Donc, ça a posé de nombreux problèmes à ce niveau là. Mais certaines semaines, j’avais sur Internet quatre ou cinq messages. J’avais des questions de comment se marier, comment obtenir le visa, qu’est ce qu’il fallait faire, à qui il fallait s’adresser et d’autres alors qu’ils étaient déjà en Colombie, qui étaient déjà mariés. Voilà je suis marié, je veux rentrer en France avec mon épouse, qu’est-ce qu’il faut faire, dans la mesure où si le mariage n’est pas enregistré, on ne lui donne pas le visa. Et de toute façon, le nouveau marié s’il avait pris 15 jours de vacances, il ne pouvait pas repartir avec son épouse aussi sec dans la mesure où l’enregistrement du mariage se fait à Bogota avec toutes les pièces à joindre et il faut au moins 15 jours ouvrables pour l’enregistrement du mariage. Ensuite, il faut le rendez-vous pour le visa qui était une fois que le mariage est enregistré, le visa était donné, même si on a trouvé des situations également très particulières, un gars qui n’était pas de Bucaramanga, mais un gars de Paris, qui s’était marié avec une colombienne et rentrait en France et presque dans les quelques jours qui ont suivi le retour du couple en France, il l’a mise à travailler sur le trottoir.

Fabrice : Ah oui ! Ça veut au moins rentabiliser son investissement parce que c’est un investissement !

Jean-Michel : C’est certainement un investissement, oui. Maintenant, on a également le cas contraire, où le français s’est marié avec une colombienne en Colombie, elle a obtenu son visa, ils sont partis en France, elle est restée avec son mari un ou deux mois, puis elle a pris ses valises et elle s’est…

Fabrice : ça a dû arriver de temps en temps j’imagine ?

Jean-Michel : Ici, à Bucaramanga, nous avons eu un mariage qui s’est fait à Bucaramanga auquel j’ai été invité et donc, tout s’est fait dans le bon ordre et quelle n’a pas été ma surprise quand deux mois et demi plus tard, on m’appelait de chez le notaire pour assister ce français que son épouse avait quitté alors qu’ils étaient ensemble à Lyon. Elle l’avait quitté sous les quinze jours, sous les trois semaines. Et donc, elle l’a fait venir en Colombie, pour que le divorce soit prononcé en Colombie. Alors que de toutes les façons le divorce aurait pu être prononcé sans la présence de cette personne française. Et donc, je me suis retrouvé, mon épouse était là avec nous, chez le notaire, entrain d’expliquer à un français qui ne comprenait pas trop ce qui lui arrivait que son épouse était entrain de se divorcer.

Fabrice : Il ne l’a pas encore compris encore !

Jean-Michel : Il ne l’avait pas trop bien compris, il ne savait pas trop le pourquoi du comment. Bien sûr, on ne pose pas trop de questions personnelles. On n’est pas là pour s’intéresser pourquoi on fait mal à ces gens-là. Mais enfin, on est resté sur les questions.

Fabrice : Oui, le cas des mariages blancs, c’est difficile à voir j’imagine.

Jean-Michel : ça se présente. Mais non, il y a des anecdotes d’un personnage, d’un français de 76 ans qui s’est marié avec une jeune fille de chocó, qui devait avoir un peu moins de 28 ans. Alors que quand ils sont arrivés à l’interview au consulat. Alors, bien sûr, le papi était en règles, il savait de quoi il s’agissait. Mais, il est difficile de dire que c’est un mariage blanc ou de dire qu’il y a une erreur quelque part. Une fois qu’ils sont mariés, ils sont mariés.

Fabrice : D’accord. Donc, les mariages c’est une part importante de ton activité.

Jean-Michel : C’était une part très importante de mon activité. Ensuite, il y a eu les enregistrements.

Fabrice : Il y a les naissances aussi ?

Jean-Michel : Les naissances. Oui, normalement, ce n’est pas moi qui s’occupais de ça. Je recevais le dossier. Je faisais suivre à Bogota. Et au retour, j’avais le livret de famille avec les actes de naissance, je l’ai communiqué aux intéressés. Il y a eu les passeports à un moment donné. On pouvait remplir les formulaires pour les passeports et envoyer à Bogota, ensuite, ils ont changé la méthode avec le système informatique. Donc, il fallait se déplacer à Bogota. Ils ont inventé l’histoire que les français de Province devaient aller deux fois à Bogota : une fois pour se présenter, faire remplir le formulaire, les photos et tout le tralala. Et un mois plus tard retourner à Bogota pour prendre le passeport. Bon, ça ils ont vu qu’à un certain moment, c’était vraiment très gênant pour les français de Province. Alors, ils ont inventé de nous permettre de remettre le passeport en personne aux français. Bon, dans mon cas, sur Bucaramanga ce n’est pas très grave, j’appelais ou j’envoyais un message et deux jours plus tard, je remettais le passeport pour les habitants, trois heures de route à cinq heures de route en avion, et bien sûr en avion, c’est 45 minutes ou 30 minutes. Mais le coup de la vie…

Il devait venir me voir, 3 minutes pour que je lui remette le passeport, que je leur fasse signer un petit formulaire à signer. C’est le système qui continue à l’heure actuelle. Bon, c’est à moindre mal. Les cartes d’identité, on peut prendre l’information sur les formulaires. Et on peut remettre les cartes d’identité. Mais cela fait que depuis sept, huit, neuf ans, le vice-consul ne peut pas être que colombien. Il doit avoir la nationalité française, parce que s’il n’a pas la nationalité française, il ne peut pas remettre les passeports, il ne peut pas remettre les cartes d’identité, et il ne peut pas prendre les procurations de vote pour les élections. C’est grosso-modo. Alors ensuite, il y a le 14 juillet, les festivités, représentation de la France. Il faut faire des conférences dans des universités, dans des écoles pour parler…

Que peut faire un vice-consul  pour un étranger en Colombie ?

Fabrice : La meilleure partie, c’est les cocktails, l’inauguration, le vernissage, je voyais souvent Jean-Michel, il n’en ratait pas une à l’alliance française, il était toujours là depuis le début. Et bon, il y avait du bon vin aussi. Et qu’est-ce qui te plaisait dans cette fonction ? J’imagine aider les autres ?

Jean-Michel : Fondamentalement, aider les français. Bon, quand on m’a demandé si j’accepterais de prendre le relève parce qu’avant que je ne sois vice-consul, il y avait eu cette dame et éventuellement que tu avais connue, qui était la dame qui a fondé l’alliance et bon, qui est décédée l’année dernière 14 juillet je crois, et qui avait été vice-consul mais qui a du interrompre ses fonctions à cause des problèmes de santé d’une de ses filles qui est décédée très jeune. Donc, il y avait des vacances et c’est le directeur de l’alliance qui un jour m’a dit : Bon, Bogota, on voudrait savoir s’il y a quelqu’un qui pourrait assurer donc le vice-consulat. Bon, je travaillais encore à l’université, je n’avais pas trop de temps. Bon, on va quand même donner un coup de main aux français. Et certains quand on s’installe à l’étranger, one ne sait pas tout, on ne voit pas tout. Et puis, il y a quand même toutes ces bizarreries de l’administration française qu’ils conviennent de ne pas laisser de côté pour s’éviter des ennuis. Alors, il y avait bien sûr des français de passage qui perdent le passeport. Donc, il faut leur donner un coup de main pour voir si ça s’accélère. Ensuite, il y a des français qui essaient de profiter de l’occasion, pour demander de l’argent au vice-consul parce qu’ils ont été volés, perdus, etc. Bon, il est recommandé de ne pas céder au chantage, et d’informer au plus vite Bogota, qui lui va donner des indications éventuellement en prenant contact avec la famille pour un envoi d’argent par… Je ne sais pas comment on appelle ça…

Fabrice : Oui, par Western Union, ou je ne sais pas, etc. Oui, parce qu’en fait, il faut dire que si vous voyagez à l’étranger, que vous avez un problème. Bon l’ambassade française, je ne vais pas dire qu’elle ne peut pas grand-chose pour vous. Mais, ce n’est pas elle qui va vous prêter de l’argent, ce n’est pas elle qui va vous mettre en contact avec la famille si besoin. Qu’est-ce qu’elle peut faire en fait ? Si un voyageur a vraiment un problème de santé, il a eu un accident, voilà ?

Jean-Michel : Moi, de toutes les façons, j’ai pris des contacts avec des familles. Peut-être que j’ai sauté par-dessus mes obligations de rapporter immédiatement en Bogota. Par exemple, il y avait eu un accident d’un gars qui était, il s’est cassé la gueule en parapente. Et donc, comme il n’était pas assuré pour ce genre de trucs, il a dit qu’il s’était cassé la gueule à cheval. Bon, ça c’est… Enfin, quand on le voyait dans l’état où il était, on savait que ce n’était pas du cheval. Etant donné les circonstances, j’ai pris contact avec son assurance qui était un bureau postal du sud de la France. Enfin de ce coin là. Alors, il fallait tenir compte des horaires. Le fameux chef du bureau de poste de ce coin là, un petit village, il n’était pas très au courant de tout cela. Enfin de compte, ça s’est arrangé. Et on a pu donc faire fonctionner l’assurance. J’en ai informé Bogota. Mais, en fin de compte, quand j’ai informé Bogota, on avait déjà trouvé solution au problème. Je ne vous dis pas qu’on m’a tiré les oreilles, mais enfin, on m’a dit que j’aurais du… Bon…

Fabrice : Ha oui…

Jean-Michel : [rire] Ouais. Enfin il y a des moments, moi je considère que… je crois que je n’ai rien fait de mal, j’ai simplement aidé au plus vite une personne qui était en difficulté. Alors maintenant pour les affaires d’argent, bon, il y a des cas où l’ambassade fait un prêt d’honneur. C’est-à-dire que ce prêt doit être remboursé au retour en France. Mais c’est très rare !

Fabrice : Oui. Mais, imaginons un voyageur qui n’a pas de famille. Imaginons, il n’a pas de famille en France, pas d’amis. Voilà. Il arrive ici, il se fait voler. Enfin, tout ce que tu peux imaginer. Enfin, comment il fait concrètement. Il va rester dans la rue, non ? Il va coucher dans la rue.

Jean-Michel : Waouh ! La grosse question !

Fabrice : C’est rare…

Jean-Michel : Oui, c’est rare, mais cela peut arriver. Bon, ça ne m’est pas arrivé heureusement parce que moi j’avais eu il y a fort longtemps un petit déboire avec un français de la Guadeloupe qui avait eu un accident d’autocar, qui se trouvait à l’hôpital et qui a dit à Bogota qu’il avait besoin d’argent. Alors, je pense fin dans les années 70’S. Donc, j’étais généreux avec lui, il me promettait dès que j’arrive en Guadeloupe, je rembourse l’argent. Et bien je l’attends toujours. Donc, il est certain qu’on est prévenu et à l’ambassade, on a dit, si vous engagez l’argent, nous ne vous rembourserons pas, qu’on doit prendre contact avec eux. Alors bien sûr maintenant qu’il y a internet, qu’il y a le téléphone portable. On prend contact dans les minutes qui suivent dans les années, fin des années 90’s, début des années 2000, c’était par courrier, par téléphone. Et le téléphone, il y a des moments où il était un peu long. Eventuellement, vous ne tombez pas sur la personne qui ne voulait pas répondre ou qui ne savait pas répondre. Donc, il faut aller chercher la personne en question. Donc, c’était un peu long. Il y en a qui ont eu des difficultés. Hier, je me suis retrouvée une fois avec des pertes de passeport, alors que moi je n’étais pas ici, j’étais à Santa-Marta et sur la place de Santa-Marta, je reçois donc un coup de téléphone voilà on a ça, on a ça. A ce moment là, j’ai demandé à l’alliance de téléphoner à Bogota et que ces personnes là expliquent leur cas parce que la seule option pour un passeport quand on tombe comme ça en rade, c’est laisser passer et le laisser passer oblige à rentrer en France.

On ne peut pas continuer le voyage en équateur, au Pérou, etc. Donc, ils demandent un passeport parce que leur passeport a été perdu, ils demandent le laissez-passer à Bogota. C’est un laissez-passer qui les autorise à rentrer en France. Mais qui ne les autorise pas à continuer leur voyage. Bon, c’est des choses qui arrivent. Après, je ne me plains pas de ce que j’ai eu à voir avec des gens que j’ai eu à aider, je n’ai jamais eu de gros problèmes sauf bon, il y a eu le cas du type qui s’est cassé la gueule. Il y a eu un autre qui a eu un accident à Giron, il était avec une copine serbe je crois. Sa copine marchait sur le trottoir, il y a une moto qui est passée et qui a pris le sac de la jeune fille et lui donc pour essayer d’arrêter le gars en moto, il a mis le pied dans la rue, la roue de la moto a pris sa jambe gauche.

Fabrice : C’est bizarre comme idée de mettre le pied pour arrêter la moto.

Jean-Michel : Oui. [Rire]. Alors, là il y a eu des histoires d’assurance. Il a fallu aller à la [Fiscalin ?] pour déclarer, pour voir ce que la jeune fille serbe a déclaré, puisqu’elle ne parlait pas espagnol. Ensuite, un an plus tard, j’ai reçu une information de l’assurance. Je suis allé faire la queue, voir le chef là-bas. Voilà, il y avait eu un tel truc, un tel là-bas un moment avec telle personne, est-ce qu’il serait possible d’obtenir un constat de… ça fait passer du temps. Maintenant, une autre anecdote assez surprenante…

Les petites histoires d’un vice-consul honoraire

Fabrice : Jean-Michel est plein d’histoires.

Jean-Michel : J’ai été invité au début des années 2000, à localiser une française qui était sur la zone de Bucaramanga, et qui soi-disant avait besoin de prothèses pour ses jambes. Donc…

Fabrice : Localiser, t’avais pas l’adresse ?

Jean-Michel : Je ne savais rien d’elle!

Fabrice : Mais qui te l’a demandé ?

Jean-Michel : On me l’a demandé de Bogota, enfin de l’ambassade consulat, ils m’ont dit qu’il y a une française, qui demanderait des aides pour une prothèse pour ses jambes, il faudrait que vous la localisez. Alors, j’ai dit qu’est-ce qui a fait la déclaration à Bogota. Donc, je savais, j’avais entendu parler de son père Mr. Falk qui avait été professeur dans un collège. Mais, je n’avais aucune connaissance qu’il avait eu des enfants, etc. Mais Mr Falk a été décédé, donc localisé une de ses filles. Alors, on a commencé à poser des questions à droite et à gauche. Et finalement, j’ai su que cette dame était dans un quartier un peu douteux de Bogota. J’étais quand même un peu réticent d’aller me mettre dans ce coin là et j’ai demandé à une personne que je connaissais de m’accompagner. Alors on voit ce quartier là, on arrive. On localise la maison. Une maison d’une qualité assez mauvaise, le sol en terre et je vois arriver une dame sur les genoux avec des trucs, enfin des trucs en cuir pour protéger ses genoux qui est venue donc. Bon, elle ne parlait pas français, puisqu’elle était en Colombie depuis l’âge de 3 ou 4 ans et qui nous raconte son histoire, elle était victime d’une mine de la deuxième guerre mondiale et qu’il a explosé dans les jambes alors qu’elle avait deux ans, trois ans là-bas dans un champ. Et donc, elle était venue avec ses parents. Mais bon, ses parents étaient morts, ils avaient soi-disant une sœur qui ne la regardait pas et qui devait être à Bogota et donc elle avait ses deux jambes amputés, elle avait besoin de prothèse et ses parents sont ensuite arrivés en Colombie avec leurs deux enfants.

Elle s’était installée à Bucaramanga. Les parents étant morts, la sœur étant partie, cette dame se retrouvait seule sans jambes avec des prothèses plus au moins primaires et donc au moment où je l’ai rencontrée, un médecin colombien voulait lui faire des prothèses à un prix que l’ambassade considérait comme trop élevé, alors qu’il y avait un français à Santa-Marta qui faisait des prothèses pour les soldats victimes des mines beaucoup plus commode et bon marché. Bon, finalement, on a pu lui faire faire ces prothèses et étant donné qu’elle était sans ressources, il l’a reconnu comme invalide de guerre et je ne sais pas trop quoi en France. Elle a eu droit à un fonds de solidarité qui existe dans chaque ambassade. Elle continue à recevoir, elle n’est plus sur Bucaramanga, elle est maintenant sur Santa-Marta, elle reçoit grosso-modo l’équivalent de 250€ qui lui permet de survivre, or qu’elle n’a pas pu travailler puisqu’elle avait ses problèmes de jambes. Et à côté de ça, il y a d’autres personnes qui reçoivent quelque chose du fonds de solidarité. Bien sûr, il faut remplir certaines conditions. Et l’ambassade, enfin le consulat à Bogota, donne également des bourses pour les étudier lycée français. Bon, les français qui sont résidés en Colombies dont les enfants se trouvent en lycée français. Alors bien sûr les expatrier, non les envoyer par la France bon on n’a pas besoin c’est pour cela. Mais des expatriés qui résident en Colombie depuis un certain bout de temps n’ont pas tous des ressources suffisantes pour payer le lycée français.

Fabrice : C’est assez cher oui.

Jean-Michel : Euh, c’est cher. Je peux vous donner le prix dans la mesure où j’ai mon petit fils qui est rentré au mois de septembre. C’est de l’ordre d’un million huit cent mille pésos…

Fabrice : ça fait…

Jean-Michel : 600€.

Fabrice : par…

Jean-Michel : par mois.

Fabrice : Ah par mois ! Je croyais que ce n’était pas trimestre. Ah oui par mois 600€, c’est cher la vache.

Jean-Michel : Eh oui, ça coûte. Donc, il y a des bourses qui sont données et également ensuite, il y a des situations de bourse par exemple des étudiants qui sortent du lycée français avec leur bac qui veulent aller étudier en France. A ce moment là selon la situation financière des parents, ils ont une petite bourse pour étudier en France. Bon, ça c’est indépendant des bourses pour les colombiens qui à ce moment là dépendent de l’ambassade, de l’attaché culturel et de coopération, qui donc donne des bourses même s’il y en a très peu pour la Colombie très peu de bourses, il y a davantage d’invitations à ce que les jeunes colombiens aillent étudier et à l’heure actuelle, il y en a 4000. Mais généralement, ils dépendent de la famille.

Avantages d’être un vice-consul

Fabrice : Alors justement puisqu’on parle sous, quand t’es vice-consul, t’as droit aux indemnités ? Une petite indemnité ?

Jean-Michel : Les premières années, on avait droit à rien du tout, strictement rien. Maintenant on a eu un consul qui était membre du bureau syndical du ministère des affaires étrangères et qui lui nous a fait obtenir une petite subvention en fonds…. Alors, nous étions sept vice-consuls honoraires. Bien sûr il y a Cali, Medellín, Barankilia et Carthagène qui avaient quand même un certain nombre d’expatriés. Disons, à Cali, à Medellín 450, 500 et bon sur la côte peut-être un peu moins. Dans mon cas, j’étais certainement l’avant dernier, t’es l’avant dernier alors il y a une enveloppe qui est votée chaque année par le ministère des affaires étrangères bien sûr chaque année revient à la baisse. Et donc, moi j’ai reçu dans les dernières années entre 450 et 650€.

Fabrice : Ah par an !

Jean-Michel : Par an !

Fabrice : Oh la la ! Par an.

Jean-Michel : Mais, je ne vais pas dire que ça ne m’a pas payé, ça me payait un peu d’internet, ça me payait un peu de courrier, des courriers spéciaux, et ça me payait une partie de l’avion, avion-taxi quand nous avions des réunions consulaires. Donc, parfois …

Fabrice : Oui, parce que les frais ne sont pas remboursés ?

Jean-Michel : Non, si ce n’est pas remboursé, c’est la subvention. Donc, ça dans mon cas, ma foi, je n’avais pas grand-chose, bon j’ai ma retraite bien sûr. Je peux collaborer dans certaines situations. Mais je ne dispose pas de fonds. On va dire, on va faire de la fiesta, le 14 juillet parce que je n’ai pas le moyen de faire une fiesta le 14 juillet. Donc il faut faire avec. Ce n’est pas une question d’argent. C’est une question quand même de donner un coup de main aux français de passage, aux expatriés bon on n’est pas trop regardant je ne suis pas là le besoin. Donc, on peut quand même faire cet effort là.

Fabrice : parce que je ne vous l’ai pas dit au début, mais Jean-Michel, il est en Colombie depuis 46 ans. Il a passé en fait plus de temps en Colombie qu’en France. Raconte un peu comment t’es arrivé en Colombie ? Parce qu’il vient du sud ouest Jean-Michel.

Jean-Michel : ça s’entend. [Rire]

Fabrice : Non un petit peu oui, ça s’entend, mais je pense tu as perdu pas mal l’accent, parce qu’il y a des accents dans la région plus…

Jean-Michel : Les nordis reconnaissent vite fait l’accent du sud ouest. Je suis arrivé comme coopérant. J’étais coopérant militaire. C’est-à-dire pour éviter les services militaires en France, on avait droit de poser notre candidature pour la coopération. Alors donc moi j’avais fait des études espagnoles, sciences po, etc. Donc, j’avais posé candidature un peu pour le Canada. Alors là, c’était un truc complètement dingue dans la mesure où le froid, on l’aurait fait partir deux semaines après. J’avais donc quand il fallait poser candidature c’était Venezuela, équateur, Colombie. Au sud, c’était Chili, [inaudible] etc. Bon, j’avais posé candidature pour un peu tous les pays latino-américain. Et on m’appelle au téléphone un jour à Toulouse, j’avais envoyé le dossier 3 semaines auparavant, par appel téléphone dans le collège où je travaillais pour me dire, voilà on a un poste à Guayaquil à l’équateur.

Alors donc j’ai demandé si je pouvais réfléchir ne serait-ce que pendant la nuit. On m’a dit « C’est oui ou c’est non ».

Fabrice : Ah oui tout de suite là !

Jean-Michel : Ah oui oui ! Donc, comme je ne voulais absolument pas me retrouver à la caserne puisque étant du sud je me suis retrouvé facilement en Allemagne, ou facilement sur les vogues, j’ai dit oui. Et j’ai demandé qu’est-ce qu’il fallait faire, il fallait que j’aile à l’alliance française à Paris. Et arrivé à l’alliance française le lendemain même, le monsieur, qui était le secrétaire général de Guayaquil vous n’avez pas le profile pour Guayaquil, m’a dit, vous allez être directeur d’alliance à Bucaramanga. Bien sûr la réaction Buca… quoi ? Et Buca quoi, ils m’ont donné un petit topo en 5 lignes à Bucaramanga, il y avait à l’époque moins de 200000 habitants, il y avait soi-disant du pétrole dans la région, du tabac. Bon, la vie paisible, il y avait une petite alliance. Et donc, je me suis retrouvé directeur alliance, mais enfin, on ne savait pas trop ce que ça veut dire le mot directeur parce qu’une fois sur place, un directeur, c’est un secrétaire, c’est un électricien, c’est un balayeur, c’est un organisateur d’activités culturelles

Fabrice : C’est une petite alliance.

L’Alliance Française en Colombie

Jean-Michel : C’était et ça a presque toujours été une petite alliance jusqu’en 2005.

Fabrice : Parce que là, elle est assez grande quand même.

Jean-Michel : Alors maintenant, je crois que sur les 14 alliances qu’il y a en Colombie, ça serait la cinquième ou la sixième. Maintenant, je crois que le mot alliance, on en a entendu parler. Il y a des moments où on confond alliance avec ambassade et avec consulat. Ce sont des organismes indépendants. Et il y a des tensions qui se nouent. Enfin, tu en as entendu causer. Tu en connais les raisons. Ce n’est pas difficile. Bon, c’est difficile à comprendre. Mais moi comme vice consul, je n’avais rien à y voir dans la mesure où j’étais directeur pendant deux ans 71 et 72 et à partir de cette date là, j’ai été membre de l’alliance jusqu’au jour où je me suis fait foutre dehors du comité directeur parce que j’ai eu la langue… peut-être que j’ai eu des choses qu’il ne fallait pas dire et donc, on a suggéré au directeur de l’époque en 80 ou 81 qu’il serait bon que je disparaisse du comité directeur. Bon, écoute c’est des choses qui arrivent, depuis je ne suis plus membre de l’alliance.

Mais enfin, quand je suis arrivé vice-consul, j’ai vu que l’alliance était sur le point de disparaitre complètement c’était le chaos le plus absolu, il n y avait pas 60 élèves. Le directeur de l’époque ne donnait pas de cours puisqu’il n’était pas préparé pédagogiquement à donner des cours. C’était la secrétaire qui faisait la pluie et le beau temps. Donc, j’ai mis mon nez quelques semaines après … parce que comme l’alliance souvent à ce moment là était dépendante de l’ambassade financièrement, on m’a demandé d’assister aux réunions du comité directeur comme audite de l’ambassade. Alors, j’ai assisté à ça, j’ai vu que c’était le chaos et donc, à l’occasion d’un voyage à Bogota, j’ai vu l’attaché de coopération qui lui était le délégué de l’alliance. Alors que maintenant les délégués sont indépendants de l’ambassade. Et bon, on a discuté là-bas et on a fait, on a pris la décision de nommer une coordinatrice pédagogique que nous connaissons qui quelques semaines plus tard s’est retrouvée directrice générale de l’alliance alors que le détaché par la France a été bombardé directeur des activités culturelles parce qu’il faut reconnaitre de la personne qui occupe actuellement l’alliance que pédagogiquement elle connait son métier et elle a remis de l’ordre là où il y avait un grand désordre. Bon, ensuite, elle s’est attachée à son alliance, son alliance est devenue une grande alliance. Les alliances n’ont jamais d’argent alors que l’alliance de Bucaramanga a de l’argent.

Fabrice : C’est une alliance française qui tourne. Et donc quand t’es arrivé, tu as été pendant deux ans directeur d’alliance française, là tu as rencontré ta future femme.

Jean-Michel : Ah oui, je l’ai rencontrée pratiquement 5 mois plus tard. On s’est mariés…

Fabrice : Quand t’es arrivé.

Jean-Michel : On s’est mariés un an plus tard. Il faut reconnaître qu’elle a été mon élève à la UIS à l’université. Mais, je l’avais connu avant d’être son prof.

Fabrice : Donc, ça va ça passe.

Jean-Michel : Ça a permis de faire des choses que je n’aurais pas faites si je ne l’avais pas connue auparavant.

Fabrice : D’accord. Là, tu t’es dit, je vais rester.

Jean-Michel : Bon là de toutes façons, pour l’alliance, je travaillais également dans des collèges, j’ai travaillé dans le collège de la présentation pendant … J’ai travaillé 2 ans comme directeur d’alliance et ensuite, j’ai gardé le contrat 8 ans plus tard. Alors, étant directeur de l’alliance, la UIS m’a demandé de donner des cours à la nouvelle licence de langue qui venait de se créer. Alors, c’était les cours du soir, ça démarrait à 5 heures et ça allait jusqu’à 2h du soir. Donc, moi, j’avais des activités pendant la journée à l’alliance. Je vais à 5h, je partais pour quelques heures à l’université. Et à ce moment là, sur Bucaramanga, il y avait 8 autres coopérants qui étaient envoyés pour l’université industrielle des ingénieurs en chimie, mécanique, etc. Et ces coopérants étaient mes professeurs à l’alliance. Alors, ça donnait une ambiance chouette, parce que parfois les jolies colombiennes étaient attirées par les gentils français. Et les gentils français étaient sous le charme des gentilles colombiennes dans la mesure où des 8, enfin nous étions 9. Nous sommes tous repartis mariés. Enfin, les autres sont repartis mariés, moi je suis resté.

Fabrice : Ah oui, c’est efficace.

Jean-Michel : [rire] et donc il y en a un, je crois que tu l’as rencontré l’année dernière et son épouse Nora qui après avoir terminé leurs activités au Mexique, sont revenus à Bucaramanga où ils sont toujours.

Fabrice : Donc, tu as travaillé à l’université de Santander…

Jean-Michel : Tout en étant directeur de l’alliance.

Fabrice : D’accord et ça, ça a duré combien de temps ?

Jean-Michel : ça a duré jusqu’au 31 décembre 1972. Donc, j’ai terminé mon contrôle de coopération parce qu’on était soi-disant militaires pendant 14 mois. Mais, on devait signer le contrat pour 24 mois. C’est-à-dire, je donnais une heure de classe, j’étais payé pour cette heure là. Et donc, une fois que j’ai terminé à l’alliance, le collège de la présentation m’a proposé un contrat où je travaillais de 6h du matin, à 8, 9h. Et la Fac m’a pris à mi-temps, ensuite, quelques mois plus tard, elle m’a pris à trois quarts de temps, jusqu’au moment où j’ai obtenu un temps complet. Et le gros avantage que j’avais c’était que dans cette licence de langue anglais-français venait juste de démarrer. Et c’est moi qui ais du assurer la construction de tous les cours pendant les 5 ans que durait la licence. Ah j’ai pris plaisir à faire ce truc là. Puis, les élèves étaient sympas. Il y avait une bonne ambiance. Et puis, quand j’enseigne le français à ce niveau là, tu vois des progrès, tu démarres un matin avec rien et une semaine plus tard, ils vont savoir : bonjour, bonsoir, comment vas-tu et bon, au fur et à mesure que les semestres passent, bien sûr, ils arrivent à des résultats, c’est intéressant.

Fabrice : Ça fait plaisir à entendre.

Jean-Michel : Oui, ça fait plaisir à entendre, il est certain que l’ambiance universitaire colombienne ne ressemble pas à ce que nous avons connu en France où le prof arrive avec tout son grand savoir. et remplit le tableau, à des amphithéâtres où il y a 500, 600 ou davantage d’étudiants. Alors qu’ici, j’en avais que maximum que 50, 35.

Fabrice : Et ensuite, tu as fait l’essentiel de ta carrière dans l’enseignement en Colombie.

Jean-Michel : 30 ans.

Fabrice : 30 ans et ensuite ?

Jean-Michel : On a fait un peu de commerce.

Fabrice : Ah oui, tu avais un bar et un café.

Jean-Michel : Avec la belle famille, moi je t’ai dit que j’avais pas mal de beaux frères et belles sœurs bon comme on est en bon entente, nous avons participé à des activités commerciales. Ma femme a été gérante de magasin de meubles et décoration. On a eu un petit café aussi. On avait également un petit magasin de cadeaux. Moi, à une époque, mon beau frère produisait des œufs et des poules. Moi, je vendais des œufs et des poules. Il fallait nous en sortir à mon avis.

Fabrice : Oui, comme on se retrouve à passer 46 ans en Colombie ? J’imagine que le temps ça va vite, tu me disais, tu rentres en général tous les étés en France.

Jean-Michel : Bon, tu sais maintenant que je suis en retraite, on essaie quand même d’y aller pour un petit mois. Bon, avant quand on avait les vacances universitaires, c’était très court, parce qu’on ne disposait que de 20, 22 ou 23 jours. Là, depuis que je suis à la retraite, nous avons pu aller, deux mois, trois mois, quatre mois. Si je n’avais pas mon fils au Canada éventuellement, on passerait davantage de temps en France. J’ai une maison dans le sud ouest. Il faut aller bien manger et bien boire, je n’ai pas de famille et donc, je ne peux pas dire que je vais voir la famille. Les amis après 46 ans, on les voit, mais on ne sait pas trop quoi leur demander.

Fabrice : C’est vrai que quand tu pars 20 ans, oui quand tu as 20 ans, c’est difficile de maintenir des liens profonds…

Jean-Michel : Surtout que pendant 30 ans, internet n’existait pas et ce n’est pas les jeunes qui éventuellement à mon âge, à l’heure actuelle, ils ne sont pas trop sur Internet dans les campagnes françaises. Bon, je ne me plains pas d’être resté en Colombie !

 

 

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