Joies et déboires du couple mixte : mon expérience
8Ces femmes de ma vie, ces étrangères, ont, pour être exact, toutes vécu en France. En effet, je les ai toutes rencontrées « à domicile », si vous me permettez l’expression.
Elles étaient étudiantes ou actives, elles étaient venues par amour de notre langue. Elles sont restées par amour du pays. Elles sont parfois reparties et je les ai suivies.
L’année passée, j’avais écrit un article sur pourquoi j’adorais sortir avec des femmes étrangères. Bon, je ne suis pas aussi sectaire, j’aime beaucoup les Françaises aussi, du moment qu’elles aiment voyager et qu’elles aient un certain état d’esprit. Car au final, c’est cela le plus important.
Je m’étais dit que j’écrirais sur le couple mixte, donc, action ! Oui, car quand on aime voyager, quand on aime vivre à l’étranger, forcément, il y a plus de chances que l’on se mette avec une personne d’une autre nationalité. Ben oui, c’est logique, hein. On aime l’ailleurs, la différence, et cela se retrouve donc chez une femme autant que dans un pays. Par exemple, au cours d’une soirée, je vais être davantage attiré par ce qui est différent et c’est tout naturellement que je vais m’intéresser plutôt à ces femmes venues d’ailleurs.
Je crois que pour d’aucuns il peut y avoir un certain fantasme au sujet du couple mixte. Comme je le comprends.
Sur le papier, c’est chouette, cela présente aussi bien qu’une jolie carte postale. Il y a la richesse de découvrir une autre culture, une autre langue grâce à une personne que l’on aime et qui vous aime (enfin, normalement !), sans oublier le fait d’élever des enfants en leur apportant la richesse de deux cultures, de deux langues.
On découvre aussi le pays de l’autre, en profondeur, à un autre niveau qu’en voyage. Et en général, on tombe amoureux du pays aussi (enfin, normalement !). Il y a toujours des exceptions. Oui, on y vit ou du moins on y passe beaucoup de temps, en bref, on vit vraiment le pays, on ne fait pas que l’effleurer. Franchement, les deux processus en même temps, c’est jouissif. Vraiment.
Je n’évoquerai qu’en deux phrases Tanja et l’Allemagne, mon premier amour. Elle avait le gros défaut d’avoir un copain resté au pays et a fait l’erreur, fatale, d’avoir voulu me le présenter un soir, en frappant à ma porte. Je ne suis donc pas passé par la case Allemagne (qui a dit tant mieux dans la salle ?), pourtant, j’avais commencé à apprendre la langue. Je ne sais pas pourquoi, l’un des mots qui me restent, c’est frigo, Kühlschrank, allez comprendre…
L’insoutenable légèreté de l’être
Gabriela m’a fait découvrir la Roumanie et les pays de l’Est. Une belle histoire. Ma première vraie histoire, vous savez le truc joli dont on rêve tous. Je me tapais les 35 heures de bus Eurolines pour aller la voir pour une semaine, les trains sans chauffage des Carpates en hiver, le stop à travers le pays. Et tout cela avec le sourire. Oui, de chouettes souvenirs.
Je suis donc aussi tombé amoureux de la Roumanie. Là encore, j’ai voulu apprendre la langue, j’avais acheté la méthode ASSIMIL à l’époque avec le CD et tout et tout. Je suis tombé amoureux des pays de l’Est d’une façon générale. Je crois que cela a commencé avec la lecture de « L’insoutenable légèreté de l’être » de Kundera le Tchèque, l’un de mes auteurs fétiches.
J’avais lu ce livre tout en tombant amoureux de celle qui me l’avait prêté. J’avais pris mon temps pour le lire, savourant chaque page, chaque chapitre, d’autant qu’il me rapprochait d’une fin désirée avec sa propriétaire.
Je n’ai pas précisé, mais ici, je ne parle pas des mariages arrangés, blancs, gris et autres mariages de raison. Il n’est pas question ici de « mariages au rabais » du genre le gars qui importe une jeune asiatique pour avoir bobonne à la maison en échange du visa donné. C’est le cas également d’une partie de la communauté arabe en France qui tombe encore dans ces pratiques.
Ma « particularité », peut-être, c’est que ces femmes d’ailleurs, je les ai toutes rencontrées en France, ce qui simplifie certaines choses, comme je vais l’aborder plus loin.
Latine
C’est par et pour Laura que je suis parti en Colombie en 2011 et que j’y vis une grande partie de l’année depuis. Elle aussi, je l’ai rencontré en France où elle vivait depuis cinq ans. Enfin, ce n’est pas tout à fait exact. En réalité, nous nous sommes rencontrés en Égypte lors d’un voyage sur le Nil. Il est vrai que cela fait assez glamour.
L’Amérique du Sud, c’est une autre culture, mais une autre culture avec des points communs avec celle de l’Europe. Ici, j’ai embrassé aussi une autre vie, un autre monde en vivant en Colombie. Pour le meilleure.
Même avec une personne dont la culture semble proche de la notre, il y a des différences. Parfois, elles ne se voient pas au début. Il faut parfois du temps pour en prendre conscience. Il peut y avoir certains comportements qui pour nous ne semblent pas logique, mais qui s’expliquent pour la culture.
La différence
Plus votre compagne (ou compagnon) vient d’une culture différente et plus c’est difficile. Même avec un autre pays d’Europe, il peut y avoir une certaine différence, alors imaginez un peu avec l’Afrique ou l’Asie. Pour l’Amérique latine, au moins la religion est la même, et donc la culture est assez proche. Non que cela soit important pour moi, mais qui dit religion, dit culture, et une religion façonne un système de pensée. Cela ne peut pas être réduit à une pratique dominicale.
Soyons clair, dans toute relation avec une étrangère, (ou un étranger, bon, je vais employer le féminin à chaque fois pour faire plus simple) le fait que vous ne soyez pas de son pays est un plus niveau séduction. Simplement, car vous vous distinguez de la masse, vous êtes exotique. Il n’y a là rien que de très normal et cela fait partie du jeu de la séduction. Au final, comme dans d’autres domaines, il faut savoir se distinguer.
Ensuite, plus la différence socio-économique est importante entre deux pays et plus le facteur « matériel » va jouer un rôle. Encore que le plus important soit plutôt le niveau social entre les deux personnes. Si celle ou celui d’ailleurs vient d’une famille aisée et cultivée, la différence est gommée. Après tout, cela existe même en France. Oui, il y a des femmes et des hommes qui sont surtout intéressés par la situation de l’autre.
L’amour, qu’est-ce que c’est ?
En fait, la question de l’amour diffère selon les cultures. Elle varie déjà selon les individus, mais il faut compter aussi sur l’aspect culturel. Il faut savoir que dans le monde, la majorité des mariages sont des mariages arrangés ou forcés. Et dans le meilleur des cas, ce sont des mariages de raison. À l’échelle de la planète, le mariage d’amour est donc minoritaire. Et si l’on parle ensuite des mariages d’amour qui durent, alors là… J’ai bien dit « amour », pas ce mélange d’habitudes, de confort et d’attachement pour lequel on préfère parfois employer le mot amour.
A lire : 40 ans, pas marié, sans enfants.
Beaucoup d’expatriés en Asie m’ont dit que pour les femmes asiatiques, l’amour était secondaire. Ce qui comptait, c’était le matériel et la situation. OK, il doit y avoir plein d’exceptions, mais vu le nombre de personnes qui me l’ont rapporté, forcément, c’est qu’il y a là une vérité.
Le truc, c’est que, déjà dans son propre pays, il n’est pas facile de savoir ce que signifie aimer pour l’autre. Il est compliqué de comprendre ce qu’il met derrière. Pour beaucoup, nous vivons dans le non-dit ou le malentendu. Or, avec une personne d’un autre pays, il y a une difficulté en plus : que veut dire l’amour dans sa culture ?
Avec le recul, je me dis parfois « pourquoi faire compliquer quand on peut faire plus simple ? » Mince, j’entends alors la voix de mon vieux père qui n’a cessé de me répéter « Pff, tu peux pas trouver une femme par-là (NDLR : en Ardèche, pas loin du village), pourquoi aller chercher si loin ? ». En vérité, ce n’est finalement pas une réflexion totalement déplacée.
A lire : merci à mon père qui n’a jamais voyagé.
Les sociologues le savent, l’hétérogamie, le fait que votre conjoint soit d’une classe sociale et/ou d’un pays différent du vôtre, est source de séparation relativement rapide dans les couples. Et dans le genre couple mixte composé d’un Africain subsaharien et d’un Occidental, on peut dire que ce n’est pas gagné quand la religion, la culture et le niveau culturel et économique sont différents.
Le problème du pays où vivre
Quand la relation devient sérieuse, la question va forcément se poser. La plupart choisissent l’un des deux pays en fonction des goûts et de la vie professionnelle. D’autres font le choix d’un 3e pays, comme cela, pas de jaloux. Et puis, les deux sont ainsi dans la découverte, dans l’expatriation.
La question reviendra sans doute plus tard, quand les parents de chacun seront dans leurs dernières années ou quand il sera question de choisir le pays où vieillir.
Et la religion de l’enfant ?
Voilà un sujet qui peut être épineux pour beaucoup. Soit l’un des deux lâche du lest, soit la décision est prise de ne pas décider pour l’enfant. La religion des deux parents est alors enseignée, libre à lui ensuite de choisir.
C’est le choix d’Aurélie et de son mari, comme elle le raconte dans cet épisode du podcast sur les couples mixtes. Parfois, l’une des deux familles veut imposer la conversion de l’époux ou de l’épouse. La question est souvent épineuse pour les couples mixtes entre chrétien et musulman.
Se convertir ou partir
C’est sans doute l’une des choses les plus difficiles. Je connais des exemples autour de moi, et soit cela a capoté, soit cela a provoqué une rupture avec l’une des deux familles. Et ce n’est pas par manque d’amour ou autre.
Non, c’est juste que l’on touche là à quelque chose de fort : l’appartenance à une communauté, une famille, et cela, c’est un besoin qui se place au-dessus de l’amour. Cela peut paraître curieux, mais il est parfois plus facile de former un couple avec quelqu’un venant d’Amérique latine ou d’Asie qu’avec une Française née en France, mais dont la famille est arabe. Car outre les différences de religion et de culture, il est aussi question, parfois, de racisme. Oui, le racisme, c’est aussi dans ce sens-là.
Si l’une des deux familles n’est pas très ouverte, la question de la conversion va certainement se poser à un moment. Cependant, je pense que se convertir par obligation est un mauvais calcul sur le long terme.
Vous pourriez le regretter plus tard et le reprocher à l’autre. De plus, c’est se mettre en position de soumission envers la famille de l’autre. Et cela, c’est mauvais signe. Et puis, vous n’avez à vous soumettre à la famille de l’autre, ni à la votre.
L’importance de la communication
Communiquer, c’est vital dans un couple. Je veux dire communiquer vraiment et bien. C’est tout un art, c’est un travail qui s’apprend. Dans un couple mixte, c’est encore plus important, cela demande encore plus d’efforts, car les sources d’incompréhension sont nombreuses, les différences le sont aussi.
Parfois, il s’agit juste d’une histoire de mots. L’un des deux emploie mal un certain terme qui ne veut pas dire la même chose pour lui, car il maîtrise moins la langue maternelle de l’autre. C’est incroyable le nombre de malentendus que cela peut provoquer, et parfois pour des choses toutes simples.
On dit que les opposés s’attirent. Peut-être, mais pour une histoire d’amour qui marche sur le long terme, c’est plutôt les points communs qui priment. Ce n’est pas seulement mon expérience, mais le résultat d’études.
Pour tout vous dire, le couple mixte, j’y accorde bien moins d’importance qu’avant. Un couple mixte, ce sont de chouettes choses, mais aussi des difficultés. Et au final, pourquoi se créer des difficultés ? Le taux de divorce et de séparation est plus élevé dans un couple mixte, c’est une réalité.
En tout cas, il y a en France de plus en plus de couples mixtes. Ils représentent plus de 12 % des relations. Et cela n’est pas près de s’arrêter. Et bien sûr, c’est une bonne chose.
Je termine avec le témoignage d’Aurélie dont je parlais plus haut. Elle relate dans cet article un passage télé dans lequel elle parle de son couple mixte.
Et vous, si vous vivez dans un couple mixte, quel est votre avis ? Comment voyez-vous les choses ?
Coucou ! Très interessant comme article. C’est vrai et juste tout ce que tu écris par rapport notamment aux différences qui peuvent séparer plus qu’autre chose. Après c’est toujours une question d’ouverture d’esprit et de respect 🙂 Et c’est loin d’être utopique car malgré le taux de divorce , beaucoup de couples tiennent bien le coup avec de grande différences lorsqu’ils adoptent un bon état esprit et SURTOUT de la légèreté 🙂 ! Vraiment top ton site web
Merci !
Oui, comme tu dis, la légèreté et du recul, c’est important, clairement.
Bonjour Fabrice
Sujet intéressent, a vrais dire je me pose plus la question, j’ai été marié pendants 14 ans et vécu cinq ans avec une autre femme, maintenant à 63 ans je ne cherche pas vraiment, mais c’est vrais que j’y pense car dans deux ans quand je serais sur les routes pour mon tour du monde sur plusieurs années comme retraité et quand suite j’espère m’installer au Cambodge, je me pose souvent la question : Et si jamais je rencontrais l’âme sœur sur le chemin, car on fait de belles rencontres en voyageant ? Pas évident de trouver des réponses et qui sait, moi qui adore l’Asie, je vais peut être trouver une femme en Argentine ou ailleurs ?
Salut Régis,
Ce sera peut-être une autre voyageuse comme toi, de la même nationalité. 🙂
Bonjour ,
Article intéressant mais je trouve qu’il est assez à charge contre les africains. Ne vous êtes vous jamais posé la question de savoir que les africains eux-mêmes ne veulent pas épouser des personnes d’origine différente ? Étant africaine moi-même, venant d’une famille aisée et ayant moi aussi une très bonne situation en France , je ne me vois absolument pas avec un européen. En effet nous n’avons pas la même culture et puis il y a le racisme. Et oui , très souvent l’entourage du conjoint occidental a des préjugés racistes envers le conjoint africain. A ce titre , je ne veux absolument pas gérer cela. Je préfère me mettre en couple avec un africain comme moi.
Cordialement
Oui, en effet, le communautarisme est de tout côté. Je comprends en tout cas.
Je me suis marié, sans doute trop rapidement avec une femme africaine, plus jeune que moi.
J’ai des principes progressistes et libéraux (au sens politique) assez forts : respect des personnes LGBT, rationalisme (éloigné des croyances et religions), égalité des sexes, individualisme (réalisation individuelle plutôt que dépendance à la famille). Je suis, pour résumer, un produit de principes développés surtout en occident.
Vous vous doutez que ça a fini par clasher quand la discussion a évoqué le respect de nos enfant quelle que soit son orientation sexuelle ou mes interrogations face à une pratique chrétienne évangélique trop exaltée selon ma perception (sans parler des propos rétrogrades des pasteurs).
J’en suis venu à me demander comment gérer la contradiction entre ma démarche amoureuse que je pensais ouverte, mon supposé progressisme et ma perception de pratiques et propos très conservateurs en ce qui concerne mon épouse.
Et du coup, comment les choses ont évolué ?
Je comprends que cela soit difficile. On dit qu’en amour, il faut accepter l’autre comme il est.
Cela dit, ce n’est pas toujours évident, surtout pour l’éducation des enfants.
Et je comprends que les pratiques évangéliques que l’on trouve dans certains pays d’AFrique, ou ailleurs, soi rétrogrades…