Kerguelen et les TAAF : c’est pas pour toi petit !
25Les TAAF, ce sont des îles françaises du bout du monde : Kerguelen, Saint-Paul et Amsterdam, Crozet, Terre Adélie…Seul quelques privilégiés peuvent découvrir ces terres sauvages du sud. Voici pourquoi et comment y aller !
Aujourd’hui, j’ai voulu inviter Guillaume sur le blog afin qu’il puisse parler et vous faire découvrir une destination hors des sentiers battus. Là, pour le coup, c’est pas une parole en l’air !
Je m’appelle Guillaume, et depuis bientôt 2 ans j’habite sur l’île de la Réunion.
Jusque-là, rien d’exceptionnel, les cocotiers et les plages qui font rêver, tout le monde connaît. Mais voilà, grâce à mon travail, j’ai l’occasion, depuis que je suis installé ici, de partir faire des petits séjours dans les Terres Australes et Antarctiques Françaises : les TAAF.
Et c’est là que ça devient intéressant.
Une présentation s’impose
Les TAAF, c’est un ensemble d’îles et d’archipels appartenant à la France, mais qui pourtant sont très peu connus du grand public. Kerguelen est une des îles composants ls TAAF.
Et pour cause, en tant que destination de voyage, on se dit de prime abord que c’est inaccessible.
Situées pour une partie entre l’Afrique et Madagascar et pour l’autre partie près du pôle Sud, c’est vrai, il y a peu de moyens de s’y rendre. Mais peu, ça ne veut pas dire aucun.
Pour faire simple, regardons ensemble les deux cartes ci-dessous :
En fait, les TAAF, ce sont 5 districts :
- le district des îles éparses : Tromelin, les Glorieuses, Juan de Nova, Bassas da India, Europa ;
- le district de Crozet : 5 îles volcaniques, à savoir « les Cochons », « les Apôtres », « les Pingouins », « l’île de l’Est » et enfin, la seule île habitée par l’homme, « l’île de La Possession » ;
- le district de Kerguelen : un archipel de plus de 300 ilots autour d’une île principale, nommée « la Grande Terre », et sur laquelle se trouve également la seule expédition humaine du coin, la base scientifique de Port-aux-Français. Kerguelen, c’est plus de 7 000 km², tout de même.
- le district de St-Paul et Amsterdam : deux îles éloignées d’à peine 85 kilomètres, chacun étant le sommet d’un volcan qui émergea il y a 100 000 ans environ. Ce sont les plus récentes îles des TAAF. Seule Amsterdam est habitée par l’homme.
- le district de Terre-Adélie : un triangle d’environ 400 000 km², dont le sommet est le pôle Sud lui-même. Vous l’avez deviné, Terre Adélie se situe sur le continent antarctique, sur la calotte glaciaire. Et ici aussi, il y a une base scientifique installée.
Mais que font-ils donc là bas ces gens ? me direz-vous.
Les expéditions présentes dans les TAAF sont des expéditions scientifiques constituées en grande majorité par des jeunes en fin d’étude.
Chacun se relaie tous les 6 mois voire 1 an pour mener des recherches sur de grands projets scientifiques, couvrant différents domaines : ornithologie, géologie, sismologie, climatique… Ces places sont très prisées dans le monde scientifique.
Comment un voyageur peut-il se rendre dans les TAAF ?
Je vous l’ai dit tout à l’heure, il n’est pas impossible de se rendre dans les TAAF. Je vous arrête de suite, je ne suis pas scientifique. Mais alors, comment faire pour s’y rendre ?
En fait, le siège des TAAF, installé à St-Pierre sur l’île de la Réunion, a mis en place un système de croisière ouvert au public pour cette destination. Le ravitaillement et les relèves dans ces îles sont assurés principalement par le Marion Dufresne, un bateau affrété par et pour les TAAF.
Il dispose d’un nombre limité de places à bord, mais, si au cours d’une relève, il reste des places disponibles après avoir installé les scientifiques et autre personnels qui doivent se rendre dans les TAAF pour le travail, elles sont vendues aux touristes. Et bien que le prix puisse en effrayer plus d’un, je vous prie de croire que la liste d’attente est déjà bien remplie.
Lors de la préparation d’une rotation, dès qu’il a connaissance du nombre de places restantes, le siège des TAAF contacte les inscrits sur la liste d’attente et les informe de la disponibilité d’une place.
Il faut alors se décider, et débourser entre 8 500 et 16 000 euros pour pouvoir participer à cette expédition.
C’est le tarif 2013 pour une cabine double, partagée peut-être avec un inconnu, ou bien, selon disponibilité, une cabine individuelle. Après, si vous êtes deux amis et qu’il y a une cabine duo disponible, le voyage sera moins « timide » qu’avec un inconnu.
Mais pour avoir été à la rencontre des scientifiques sur les bases de Crozet et Kerguelen, on trouve toujours un sujet de discussion passionnant à partager, donc pas d’inquiétude.
Le Marion Dufresne effectue surtout des rotations entre Crozet, Kerguelen et Amsterdam.
À votre arrivée à bord, vous serez en croisière. Donc, rien à s’occuper, juste à profiter… ou subir, si la mer devient capricieuse… ce qui peut arriver facilement notamment autour de Kerguelen, je sais de quoi je parle… hi hi.
Ça fait encore plus de souvenirs dans la tête, n’ayez pas peur !. Lorsque vous serez près de Crozet et Kerguelen, si le temps le permet, vous serez débarqués par hélicoptère sur les bases scientifiques d’Alfred Faure (Crozet) et de Port-aux-Français (Kerguelen), pour aller découvrir ces environnements exceptionnels.
Pour en savoir plus :
Pour avoir tous les détails techniques si l’aventure vous tentait, n’hésitez pas à consulter mon article dédié ici.
Pourquoi se rendre à Kerguelen et dans les TAAF ? Qu’est-ce qui nous y attend ?
Cette question est légitime. Près du pôle Sud, le tourisme ne doit pas être hyper développé. C’est vrai, effectivement, si vous venez pour faire du shopping ou découvrir une ancienne culture disparue, c’est raté. En revanche, en atterrissant à Crozet :
- vous pourrez rencontrer les scientifiques installés sur place : ils peuvent vous présenter leurs projets en cours, et certains sont curieux et donnent envie d’en savoir plus !
- vous mettrez le pied sur une destination exceptionnelle que seule une poignée d’hommes chaque année à la chance de pouvoir atteindre : perso, je trouve ça assez excitant. Allez dans un tel endroit, si peu accessible ! Je pourrais raconter plus tard : « j’y étais ! »
- vous découvrirez une manchotière. C’est quoi une manchotière ? Une bétaillère, on y met du bétail ? Et bien, une manchotière, on y trouve des manchots ! Et ils sont des milliers à avoir élu domicile sur Crozet. En fait, c’est un lieu de reproduction. À votre arrivée avec le bateau, si ça se trouve, vous les verrez évoluer dans l’eau autour du navire déjà. En posant le pied sur la plage, vous pourrez les voir à quelques mètres à peine de vous, et ça, je vous l’assure, ce sont des instants magiques dont on ne se lasse pas du tout !!!
- en plus des manchots, vous ferez connaissance aussi avec les éléphants de mer, et toute une variété d’oiseaux, dont les fameux Albatros !
À Kerguelen, il y a moins d’animaux, certes, mais :
- vous rencontrerez d’autres scientifiques, toujours l’occasion de pouvoir échanger ;
- vous aurez peut-être la chance de pouvoir marcher quelques heures lors d’une balade organisée par les hivernants, si le climat et le planning le permettent.
À Amsterdam, nouveau décor :
Si les éléphants de mer sont moins présents, les otaries, elles, en revanche, sont bien plus présentes ici : la communauté installée vous accueillera avec la même bonne humeur et de façon tout aussi plaisante que lors de vos arrêts précédents.
Ce qu’il ne faut pas oublier pour se rendre dans les TAAF :
- l’appareil photo : indispensable, ce serait bête de l’oublier sur le quai ! Se faire prendre en photo à 1 mètre d’un manchot, c’est quand même extra non ?
- respecter les consignes de sécurité : si les animaux des TAAF ne sont visiblement pas très agressifs, il faut tout de même faire attention et bien écouter les hivernants, qui les connaissent mieux que nous. Un accident peut vite arriver ;
- ses boîtes de patchs anti — mal de mer, surtout si vous êtes sensibles…. (ou alors on le fait à l’ancienne, et on affronte comme ça vient ! ça peut être sympa aussi !)
En conclusion
Vous avez vu, il existe encore des endroits très peu connus sur terre. Les TAAF et Kerguelen en font parties. Moi j’ai la chance de m’y rendre régulièrement pour mon travail. Mais honnêtement, connaissant ce que c’est aujourd’hui, et sachant ce qu’il y a à y voir, si mon travail ne m’y emmenait pas, je pense sincèrement que j’étudierais très sérieusement le financement du voyage.
J’avoue que le voyage fait un peu cher, car en plus du prix de la croisière, il faut se rendre ici sur l’île de la Réunion. Et même si on peut trouver des billets en offre spéciale à 750 euros au départ de Paris, il faut le budget aussi pour se loger et se nourrir ici sur l’île de la Réunion.
Oui, les TAFF sont une destination chère, je le reconnais. Mais honnêtement, pour celui qui est curieux du monde, et qui peut se l’offrir, je ne peux que l’encourager à entreprendre ce périple. Ça vaut vraiment le détour !
Et si vous avez des questions, n’hésitez pas non plus à me contacter. Si je ne suis pas en mer, je vous y répondrais rapidement.
Pour en savoir plus :
Je vous laisse découvrir le blog de Guillaume : http://lesvoyagesdedoudou.com/
Merci à Guillaume pour cet article ! Il n’est pas commun de rencontrer quelqu’un connaissant ces îles.
Je vous l’avez dit, là, c’est vraiment hors des sentiers battus. Kerguelen et les TAAF, une destination qui vous tente ? Moi oui ! Mais pas à ce prix par contre. Faut que je me fasse inviter…
Merci à toi pour la publication et à très bientôt pour celles et ceux qui souhaiterons un complément d’information.
Mon petit frère (pas si petit que ça 21 ans) s’en va aux îles Kerguerlens en t’en qu’écologue dans 3 jours pour minimum 15 mois avec l’IPEV. Il decolle pour la Réunion jeudi et embarque sur le Marion Dufresne vendredi! J’aurai bien aimée pouvoir lui rendre visite mais y aller en touriste c’est bien trop cher pour moi!
Le veinard ! Cela va être un sacré voyage pour lui !
Si ça t’intéresse voici son blog : joris-ornithoker-65.blogspot.fr Mais il va falloir patienter un peu il n’y a pas encore d’article.
Merci Guillaume pour ce témoignage.
Crozet, Kerguelen, j’en rêve depuis tant d’années… Un rêve inabordable pour moi malheureusement… Alors je me contente de livres, et je conseille à ceux qui veulent en savoir plus sur Kerguelen le super : « Au vent des Kerguelen » de Christophe Houdaille que j’ai dévoré il y a quelques années de ça 🙂
Le journaliste Jean-Paul Kauffmann (qui au milieu des années 80 fut retenu presque trois ans otage au Liban) a écrit un livre très fort sur son voyage aux Kerguelen. L’Arche des Kerguelen (Flammarion, 1993)
Merci pour la référence !
Merci pour l’info, je vais le lire, ça donne envie
Excellent article ! On en parle tellement peu, mais ce coin m’intéresse, notamment un embarquement à bord du Marion Dufresne, que j’envisage depuis longtemps et prévu vers les années… 2020 !! En attendant, départ vers le Groenland en mars prochain, c’est déjà bien !
C’est ce qui s’appelle de l’anticipation 🙂
Pour une raison particulière la date de 2020 ?
En 2020 ? La quille, la fin d’une longue carrière..Alors je compte bien en profiter ! Car il y aura aussi l’exposition universelle de Dubai et les JO de Tokyo !!
Ca, c’était sans compter le corona virus…Projet remis à plus tard?
Je m’apprêtais à répondre jusqu’à ce que je tombe sur ton commentaire ?
Un superbe endroit mais le « billet d’entrée » est incroyablement cher ! Il faut vraiment pouvoir débourser une telle somme ! Merci en tout cas pour la découverte, je n’en avais jamais entendu parlé !
J’ai appris l’existence des TAAF au semestre dernier en révisant un examen sur le système juridique des territoires hors métropole, mais j’avais aucune idée de ce qu’était ces territoires (hormis les classiques). Le prix de l’expédition n’est ni plus ni moins mon budget TDM pour l’année entière, donc on se contentera de les imaginer ces territoires !
Bjr
Je suis stupéfais des tarifs pour se rendre sur les TAAF !! Pourquoi n y a t il pas d aéroport pour qu on s y rende par avion ? Comme c est un territoire français chaque citoyen doit pouvoir y aller facilement.
A soumettre absolument à nos chers élus pour un changement .
La République c’est aussi la possibilité de permettre aux concitoyens de pouvoir circuler dans tous ses départements et territoires.
Harry de la Réunion.
Bonjour,
Je lis votre souhait de voir construire
un aéroport aux Kerguelen ce soir (10 décembre 2019) ! J’ai eu la chance de découvrir les Terres Australes françaises (Kerguelen, Crozet et Nouvelle Amsterdam) à l’occasion d’un reportage pour TF1 il y a bien longtemps …
Si vous connaissiez ces merveilleux archipels, leur faune, leur végétation, vous ne voudriez pour rien au monde qu’on aille bousiller un tel paradis en y construisant un aéroport ! Ce serait un crime, moral, intellectuel et bien sûr écologique.
Le trafic aérien ferait alors déferler des hordes d’inconscients qui piétineraient par ignorance ces sols, ces végétations uniques au monde. Un exemple : le chou de Kerguelen – 1,20 m de diamètre ! – a failli complètement disparaître lorsque les scientifiques ont « importé » des lapins pour diversifier leur nourriture pendant leurs missions …). Quelle erreur !
Non, il ne faut absolument pas amplifier les effets de la présence humaine sur ces terres si exceptionnelles, si précieuses par l’originalité de la vie qui y prospère encore.
Imaginez les albatros en train de couver leurs œufs. Ces oiseaux extraordinaires (leur envergure peut atteindre 3,80 mètres !) construisent leurs nids à découvert, à même les pentes de l’île. Explication : pratiquement aucun arbre ne pousse sous ces latitudes où les vents circumpolaires dépassent souvent 200 km/heure ! L’albatros, oiseau très pacifique, est aussi très vulnérable, même s’il vaut mieux éviter son coup de bec, (25 à 30 cm de long) coupant comme une lame de rasoir !
Bon, je pourrais continuer encore longtemps à argumenter pour que l’homme reste le plus discret possible, le plus rare surtout, dans un environnement aussi fragile que magnifique !
Et puis, tout ne nous est pas dû, sous prétexte de démocratisation !
Bien à vous, Jacques Collet (jcmedia75@gmail.com)
Bonjour,
sinon, on peut s’y rendre en pédalo, avec les rugissants, il n’y a qu’à se laisser porter. C’est gratuit mais le voyage sera un peu long, et il faudra faire attention aux requins blancs en passant au large d’Afrique du Sud.
On peut couper en se rendant déjà à la Réunion par avion, profiter aussi du temps clément de cette île pour aller massacrer du Coelacanthe, car il y en a marre des fossiles vivants.
Saint Paul et Amsterdam ce n’est pas mal, mais trop petit, et il n’y a plus de vaches pour son petit déjeuner.
En fait, il faut faire scientifique pour faire des voyages à l’œil (et en plus être payé), en gros.
J’y penserai, au lieu de faire dans le social et voir surtout des HLM.
j’adore ton post. je vis à la Run et jamais, jamais je n’irai à ce prix là. Pour un couple c’est de la folie. Les scientifiques ne doivent pas oublier qu’ils voyagent grâce aux deniers publics….
Bonjour, je suis étudiante et j’aimerai faire un entretien (dans le cadre de mes études), avec une personne ayant connu l’expérience kerguelen.
Quelqu’un serait d’accord ?
Si oui de préférence une personne qui vit à la réunion
Vous pouvez m’écrire … même si je vis en métropole !
Vous pouvez déjà lire mon commentaire plus haut.
À bientôt !
Jacques Collet
jcmedia75@gmail.com
Bonjour, et le tourisme pour Terre Adélie, personne ne s’est encore lancé dans ce périple ? Bon je dois dire qu’au début je posais cette question pour plaisanter mais maintenant que j’y pense, elle mérite bien d’être posée en fin de compte, je cite :
« Les TAAF, c’est un ensemble d’îles et d’archipels appartenant à la France, mais qui pourtant sont très peu connus du grand public. Kerguelen est une des îles composants les TAAF. Et pour cause, en tant que destination de voyage, on se dit de prime abord que c’est inaccessible. »
j’ai découvert ces territoires du bout du monde tout jeune via la philatélie et par la suite à la lecture de quelques bouquins sur le sujet, je rêve à plus de 60 piges d’y aller mais en effet le coût associé aux aléas climatiques qui risquent de limiter cette découverte sont un frein pour me décider. Si je n’y vais ce ne sera pas bien grave ,moins il y aura de touriste et de présence humaine sur ces territoires mieux ce sera ,quand je lis que certaines personnes qui semblent s’intéresser au sujet nous parlent de tourisme en TERRE ADELIE ou d’aéroport aux KERGUELEN, j’en conclue qu’ils n’ont rien compris, partout ou l’homme pose son pied c’est souvent synonyme de destruction, heureusement il y a le traité de l’antarctique et le protocole de MADRID qui y est associé visant a protéger (du moins je l’espère pour longtemps) ces territoires de l’appétit gargantuesque de l’humain.
Bonsoir , oui gardez une part de rêve et laissons ces terres Australes et polaires en paix, gardez vos précieux €uros pour des buts purs, n’allez pas « tourister » dans ces sud là, ou alors par des moyens propres (voilier et pédalo, bravo pour l’idée ) et dans un but constructif et collectif
JR Ker39 et TA45
Bonjour,
Je viens de tomber sur votre blog par hasard. Ça fait 20 ans que je rêve de faire une rotation sur le Marion Dufresne. Savez vous quand il recommence à embarquer des « touristes ». Leur site internet n’est pas une source d’info … avez vous un contact ou un conseil ? Merci pour votre aide. Cordialement
Pascal