Paris je t’aime, moi non plus
3Je n’ai quasiment jamais écrit sur Paris sur ce blog. Pourtant, je connais plutôt bien cette ville. J’y ai vécu pendant cinq ans, même si, pour être précis, je devrais enlever les nombreux mois pendant lesquels j’étais en voyage. Depuis 2011, j’y passe quelques mois par an, en général en évitant soigneusement l’hiver.
J’ai une relation particulière avec Paris, comme beaucoup je pense. Je me sens attaché à cette ville, mais parfois j’ai du mal. Non que je la déteste, mais parfois, j’ai envie de la fuir. C’est peut-être une des raisons pour lesquelles je n’ai jamais autant voyagé que depuis que je suis à Paris. Paris est une maîtresse exigeante. Je vais vous raconter un peu notre histoire.
La rencontre
Notre relation a commencé il y a plus de dix ans, quand j’ai débarqué à Paris après une expatriation au Nigeria. Je n’avais pas envie de retourner à Grenoble, ville de mes premières amours, aussi diverses furent-elles. Non : j’avais envie de passer à autre chose, d’avancer, et revenir dans la capitale des Alpes me paraissait alors comme un retour en arrière. C’est discutable, mais à l’époque, c’était mon sentiment. Subitement, je trouvais aussi que cette ville n’était plus assez grande. Sans doute, j’avais envie de me fondre dans la masse.
Or, quand j’ai débarqué de mon Ardèche natale à 18 ans pour faire la fac, Grenoble me paraissait une mégalopole. Les premières années, je rentrais presque tous les week-ends. Je me souviens d’un prof de fac qui se moquait gentiment de ces Ardéchois qui avaient le besoin de rentrer dans leur campagne en fin de semaine. Comme moi, l’échelle du monde, des distances, des mesures change au fil de la vie.
Et puis, entre-temps, des amis étaient montés à Paris, comme on dit. Je ne connaissais pas la ville, libre de tout, c’était donc le bon timing pour m’y installer un moment et la découvrir. Pour tout vous dire, à cette époque, j’avais le projet de me lancer dans le photojournalisme. Le destin en a décidé autrement.
J’étais déjà monté plusieurs fois par le passé à Paris ; je connaissais donc un peu la ville. C’était une première approche, c’était juste l’affaire de quelques jours, en mode touriste. Rien à voir avec la suite. Quand j’ai connu Paris, les circonstances étaient bonnes. Je venais ici par choix, non par obligation. C’est important.
Ensuite, j’y avais déjà des amis et des connaissances, ce qui facilite grandement les choses. Cela m’a permis d’ailleurs de trouver facilement un logement. De plus, dès que je suis arrivé, j’ai eu une histoire (courte) avec une femme qui était une amie d’amies. Cela m’a permis de connaître rapidement d’autres personnes, dont des vrais Parisiens. Si, si, cela existe. Enfin, j’ai débarqué ici l’été, gonflé à bloc après une expatriation et un voyage de ouf en moto à travers l’Afrique de l’Ouest. J’avais la forme.
Les débuts de la relation
Dès le premier mois, j’ai été tenté d’aller voir ailleurs. J’ai douté, j’ai hésité. J’ai bien failli partir pour une nouvelle expatriation à Dubaï, puis à Amsterdam. Cela s’est joué à peu de choses. Le destin sans doute. Bon, je l’avoue, cela n’a pas été le coup de foudre au début. Je n’ai pas été pris dans la passion pour cette ville. Il a fallu du temps pour l’apprivoiser. Ou peut-être est-ce plutôt elle qui m’a apprivoisé.
Il existe beaucoup de raisons de ne pas aimer Paris. Elle a beaucoup de défauts ! C’est très grand, il faut faire des dizaines de kilomètres pour se retrouver en pleine nature, le temps est maussade, la vie est très chère, beaucoup de monde au mètre carré, la pollution, les garçons de café parmi les moins sympas au monde et, surtout, le stress des gens. Paris oppresse, c’est une vie difficile, on sent la tension. Bref, elle est chiante, exigeante, pénible. Mais alors, pourquoi être resté ?
Un des gros avantages de Paris, c’est que le marché du travail y est dynamique. C’est, relativement facile d’y trouver du travail, dans presque tous les secteurs. Dès 2008, j’ai choisi de ne pas chercher un CDI. Je voulais avoir plus de temps pour voyager, et pas seulement n’avoir que cinq semaines par an. Depuis l’Afrique, j’avais attrapé le virus du voyage, il est resté.
Pour faire court, je suis donc arrivé à vivre plusieurs années comme cela. Je bossais huit mois, un an, puis je partais plusieurs mois. Pendant ces voyages, je sous-louais ma chambre en colocation. Je suis ainsi parti plusieurs mois en Inde et au Népal, puis plus de six mois en Asie du Sud-Est, sans parler de voyages plus courts. À chaque retour, je retrouvais un travail au bout de deux ou trois mois. Je vivais sans faire de grosses dépenses, bien sûr, mais pour moi, cela n’a jamais été un sacrifice : j’ai toujours vécu un peu en mode minimaliste. La vie est une question de priorité comme on dit : plutôt les expériences que les possessions !
Alors oui, Paris, c’est la culture, les sorties et tout et tout. Mais franchement, je ne connais pas beaucoup de Parisiens qui en profitent vraiment. Il faut avoir le budget et l’énergie. C’est plus l’impression d’avoir le choix et de pouvoir le faire. Et puis, entre nous, entre voir un coucher de soleil sur un paysage de rêve et aller au théâtre, le choix est vite fait, pour ce qui me concerne.
Pour moi, ce qui me retient à Paris, outre la facilité de prendre un billet d’avion, ce sont les amies et connaissances que j’y ai. Les souvenirs aussi, dans une moindre mesure. Au final, ce qui attache à un lieu, ce sont les personnes.
Changements et rupture
Paris était donc un choix raisonnable aussi, une certaine forme de sécurité. Un amour de raison. Au retour de mon dernier voyage au longs cours, en 2009, les choses ont changé. J’étais fatigué de ces cycles et de ces retours. Cela demande de l’énergie et je savais que cela serait de plus en plus difficile à l’avenir. Il fallait que la relation évolue, j’avais changé. Je me suis alors demandé comment je pourrais concilier travail et boulot.
En 2011, j’ai choisi de rompre, de prendre le large. Je suis parti en Amérique latine pour changer de vie. Je ne suis pas revenu pendant près d’un an et demi. Puis, j’ai repris contact. Au début, c’était timide. Mais il n’y avait pas de pression. Comme une histoire à long terme n’était pas possible entre nous, la relation était alors plus légère et plus facile. Pas d’enjeu. J’y ai pris plus de plaisir à chaque fois que je suis revenu à Paris : je n’y trouvais que les bons cotés, au final.
Un amour impossible
Cela fait six ans que je ne vis plus en région parisienne à temps plein. Je n’y passe que quelques mois par mois, en général l’été. Y vivre douze mois dans l’année, ce serait difficile pour moi, clairement. Disons que, de novembre à avril, ce serait difficile : hiver froid, pics de pollution, grisaille du temps et des gens, il me faudrait partir régulièrement ailleurs.
J’aime Paris à petite dose. J’ai du mal à couper le cordon complétement. Un peu comme une ex avec qui on a partagé des bons moments et pour qui on a encore de l’affection, voir des sentiments, même si rien n’est possible sur le long terme.
Vous n’avez jamais connu cela ?
Héhé, on a tout quitté à Paris pour partir voyager autour du monde en famille ! Et j’ai beau n’avoir aucun regret, parfois, à l’autre bout du monde j’ai une pensée émue pour la ville qui nous a vu vivre tant d’années 😀
🙂 Je comprends tout à fait
Je dois dire que j’aime beaucoup Paris, même si les défauts que tu cites sont en effet flagrants. J’y vis pour le travail, mais aussi et surtout parce que je ne me lasse pas de la découvrir, de l’architecture, et de ses possibilités culturelles. Mais une fois de plus, comme tu le soulignes, il faut vraiment en profiter de ces sorties, sinon autant vivre au calme dans une ville de province 😀
Par contre je comprends tout à fait le besoin de voir autre chose et de s’évader régulièrement, c’est aussi mon cas 🙂