Flash Back. Malacca est un nom qui m’a longtemps fait rêver. Cette ville de Malaisie est souvent citée dans les chansons de marins et d’aventuriers. Située sur le détroit qui porte son nom, elle fut convoitée tout au long des siècles. J’y suis passé, j’y ai acheté un harmonica et j’y ai fait une rencontre essentielle.
Cet épisode se situe vers la fin d’un long voyage effectué en Asie du Sud-Est en 2009. La Malaisie était alors une de mes dernières étapes. Un bon souvenir surtout pour la plongée. J’ai passé en effet mon niveau 2 PADI sur les îles Perhentianes, des îles de rêves.
Après une semaine de plongée, et après avoir pris le Jungle Train, j’ai fait une longue halte à Malacca. J’ai aimé cette ville. En cet été 2009, le roi de la Pop venait de décéder. Tous les bars de la ville jouaient ses tubes.
A Malacca, j’ai fait une rencontre qui a eu pas mal d’incidence sur mes choix de vie. Si vous me lisez là, c’est sans doute en partie à cause d’Herry…
Pour en savoir plus :
Depuis le début du blog, en 2010, je publie régulièrement la série « Flash Back ». Ces texte et photos sont tirés de mes anciens carnets de voyage.
Malacca, une histoire mouvementée
Fondée au XVème siècle par un émir répudié de Sumatra, Malacca devint vite une cité florissante capitale d’un puissant sultanat ayant embrassé l’Islam. La ville était alors le port le plus important d’Asie du Sud-Est, notamment grâce au commerce des épices.
C’est pour cette raison que débarquèrent les Portugais. Alfonso de Albuquerque prit finalement la ville en 1511. Saint François Xavier et les Jésuites arrivèrent peu après, fer de lance de la propagation de la foi catholique en Asie, accompagnant les soldats au combat et baptisant les survivants indigènes, tout cela au nom de Dieu bien sûr.
Puis les Hollandais, les Anglais et pour une courte période, les Japonais se succédèrent à Malacca.
Les vestiges historiques
La place rouge est le centre historique de la ville. Le Stardhius, centre de l’administration hollandaise et la Christ Church attenante ont été construits en pierre rouge et rose d’où le surnom donné à Town Square.
Autour de la place, des ricksaws jaunes couverts de fleurs et de cœurs baladent des couples, une enceinte crachant du Céline Dion à fond. Pas de doute, le kitch est asiatique.
Derrière, la colline Saint-Patrick et son église dont il ne reste que les murs. De vieilles stèles en vieux hollandais témoignent du « départ » de riches notables bataves.
La porte de Santiago est le seul vestige qui reste du fort originel des Portugais. A l’arrivée des Hollandais, ceux-ci devinrent pêcheurs et se marièrent avec des locales. Aussi ne reste-il de cet héritage qu’un petit quartier en bord de mer autour de la place des Portugais. Bars de Lisbonne et restaurants y servent de la cuisine lusitanienne .
La deuxième colline du centre est entièrement recouverte d’un cimetière chinois, le plus vaste au monde en dehors de la Chine.
Malacca est un bel exemple de ville historique qui a été relativement bien conservée. La nuit la rend encore plus belle.
Petite déception par contre, pas le moindre bateau de pêche, le port a été déplacé à des kilomètres en dehors de la ville.
Malacca : un métissage culturel
Occidentaux, Indiens, Chinois, et autres Asiatiques se côtoient dans ses rues. Une cité qui représente bien la diversité de la Malaisie : à côté d’un temple hindou, une mosquée, un peu plus loin un temple chinois, en face une église catholique et une autre protestante. Difficile de faire plus hétéroclite à quelques rues d’intervalles !
J’aime beaucoup cette mixité qui doit être assez rare dans le monde. La Malaisie devrait être citée plus souvent comme un exemple de bonne entente entre diverses cultures et religions. Rien n’est parfait bien sûr, Indiens et Chinois réclament plus d’égalité mais enfin tout cela fonctionne étonnamment bien et je trouve que vraiment c’est une belle illustration que l’on peut tous vivre ensemble sans forcément en venir aux mains.
Ici, même les restaurants sont des monuments historiques. Chinatown abrite nombre de vieilles bâtisses, construites par des riches négociants chinois.
Les Indiens eux aussi arrivèrent ici pour le commerce mais aussi pour travailler comme manœuvres dans les immenses plantations de caoutchouc du pays (cela me rappelle le superbe roman » le palais de miroirs » une grande saga historique se déroulant de l’Inde à la Malaisie).
Jonker Walk accueille un marché de nuit, des karaokés, des boutiques d’antiquités, des cours de gym nocturnes.
Il y encore peu, un cordonnier fabriquait encore de minuscules chaussures pour de vieilles Chinoises, Sans doute avez-vous entendu parlé de cette tradition qui voulait que dès la naissance, les pieds des femmes en Chine étaient bandés afin d’empêcher leur croissance.
C’était à l’époque un canon de beauté…et de souffrance. Il parait que les hommes trouvaient cela érotique ! Incroyable de voir la taille de ces pieds ! Les chaussures doivent mesurer tout au plus 15-20 cm !
Une boutique sur deux semble diffuser un tube de Michael Jackson, à croire que tout le monde semble d’un coup se rappeler de Bambi. Du coup avec les ventes, il est train de combler ses dettes, ça lui fait une belle jambe tiens.
J’évolue entre le Geographic Cafe et le Discovery cafe au centre. J’y rencontre Steve, un Américain de 39 ans en vadrouille. Devinez d’ou il vient ? Gagné, de San Francisco, comme un Américain sur deux que je rencontre.
Il faut dire que Steve, blanc, est né en Ethiopie. Il était son boss en conduisant des limousines pour de riches hommes d’affaires. » Très américain, cette bêtise du paraître dans ces luxueuses berlines » comme il le confie lui-même. Steve a tout vendu, sa maison comprise. Mon avis est qu’il doit y avoir une femme là dessous. En tout cas ce long voyage a pas mal changé sa façon de voir la vie.
L’harmonica
J’ai toujours trouvé cet instrument de musique plaisant. Surtout, c’est vraiment pour moi l’instrument de musique nomade par excellence : il tient dans la poche du voyageur !
J’ai envie de m’essayer à l’harmonica. Sur un coup de tête, je pousse la porte d’une boutique d’instrument de musique tenu par un vieux chinois. Il me montre plusieurs harmonicas, j’ai un coup de cœur pour l’un deux, un Marine Band de la célèbre marque Hohner. Pour la petite histoire, ce modèle crée en 1896 n’a quasiment pas changé depuis. C’est L’harmonica du blues, il fut vendu à des millions d’exemplaires dans le monde.
Je ressors de la boutique enchanté par mon achat. Sur une jetée du port, j’essaye le soir même de maitriser l’instrument.
Acheter un harmonica à Malacca me fait toujours penser à une chanson des Naufragés, un groupe assez connu dans les années 90. Ils ont été comparés aux Pogues, ce qui devrait vous donner une bonne idée du style musicale du groupe.
Un de leur titre phare était une reprise d’une chanson de marin intitulé « l’harmonica ».
“Dans mon sac de matelot,
J’ai mis tout ce que j’avais de plus beau
Souvenirs de tous pays,
Bouteille de rhum et de whisky
Une montre et elle ne marche pas,
Ma pipe et mon tabac
J’y ai mis l’harmonica,
Qu’j’avais acheté à Malaga.”
Spécial bonus pour le week-end : la chanson à écouter interprété par les Naufragés ! Elle fait voyager non ?
Herry
« Pourquoi ne fais-tu pas ce que tu aimes à fond ? » me déclare Herry, un grand gaillard allemand. Cela fait 20 mn que je viens de le rencontrer à la terrasse d’un café alors que Billie Jean fait des siennes.
Herry fait partie de ces gens qui se révèlent vite être attachant. Il réside une partie de l’année en Malaisie. Il vit de sa passion : la production de vidéo pour des clients diverses notamment dans le secteur du tourisme.
Il passe une grande partie de l’année au soleil en partie à cause d’une maladie génétique rare. Pour se soigner, il a besoin de soleil, une denrée qui n’est pas assez présente en Allemagne.
Le courant est tout de suite très bien passé entre nous. Il faut dire qu’on a des points communs mis a part le voyage. Il est d’origine roumaine, apparemment lointaine car je parle mieux roumain que lui. (NDLR : à cette époque, je venais de passer pas mal de temps en Roumanie)
Et puis il a exercé comme divemaster auparavant. Je lui parle de mes derniers jours aux îles Perhentianes. Et voici qu’il me sort » ha tu es devenu accroc, cela se voit dans tes yeux quand tu en parles, je connais ça ! ».
En parlant avec lui, j’ai mis un mot sur la sensation qu’on éprouve sous l’eau, c’est celle de voler. Oui vous avez bien lu. Après un temps, lorsque vous maîtrisez assez votre flottabilité et votre respiration, vous pouvez sans effort en ajustant votre souffle, en inspirant ou en expirant, raser les récifs, monter et descendre à votre guise, contempler les paysages sous-marins.
La plongée; à ce moment-là, procure a la fois un grand plaisir et de l’adrénaline. Herry me raconte que d’après certaines études, certains gros plongeurs souffrent d’effets négatifs sur le cerveau. Un peu comme les alcooliques qui ont perdu au passage quelques neurones.
Peut-être est-ce l’effet de l’azote, ne parle-t-on pas d’ailleurs d’ivresse des profondeurs? Il n’empêche, j’ai encore quelques plongées devant moi d’ici là…
Nous allons parler passion, voyage, relations de couples, travail et au final de nos choix de vie. Sont-ils conformes à ce que nous attendons de nos vies ? Sont-ils en phases avec nos rêves ?
Lorsque vous vous levez le matin, devant la glace de la salle de bain, êtes-vous content de ce que vous allez faire dans la journée ?
Herry me parle de choix de vie, du voyage, des relations de couple. Une discussion franche qui restera longtemps en moi.
Quelques jours après, je le recroisé à nouveau dans un hôtel de Kuala Lumpur.
Herry et moi, nous n’aurons que peu discuter au final. Mais nul besoin de beaucoup de temps pour qu’une rencontre vous marque de son empreinte et vous fasse avancer.
Et vous, avez-vous connu ce genre de rencontres en voyage qui peuvent changer beaucoup de choses ?
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En voyage, surtout dans les voyages au long cours, on fait souvent ce genre de rencontres. A croire que plus on s’éloigne de ce qui, semblait-il, nous définit, plus on réalise à quel point cela ne nous définissait pas du tout.
L’instrument de musique reste l’un des meilleurs compagnons du bourlingueur. Chacun le sien, ma préférence se tourne vers la guitare. Peu importe si l’on joue « bien » ou pas. La musique est un moyen unique de se reconnecter à ce qu’il y a de plus vrai à l’intérieur de nous, et aussi le meilleur moyen de faire des rencontres.
Malacca de son nom malais (qu’on orthographie aussi Melaka) reste un endroit du globe qui m’a profondément marquée, tant par la gentillesse de ses habitants que par l’entente incroyable qui y règne entre les diverses cultures, religions – comme tu l’écris dans ton billet.
J’y ai été fin 2013, et je peux dire en souriant que Céline Dion et rickshaws couverts de fleurs sont toujours là !
En parlant de guitare, il existe des modèles pour le voyage je crois.
Tu peux les plier en partie, cela te dit quelque chose ?
Effectivement, celles ou on peut plier le manche. Je n’en ai pas testé mais c’est vrai que cela peut s’avérer bien pratique pour voyager.
J’en achète sur place en général (pour presque rien) et ensuite, au moment du départ, je l’offre à un local qui est musicien. Cela ne m’aura pas coûté grand chose mais le plaisir que je lis dans ses yeux à lui, ça n’a pas de prix 😉
En effet, cela doit être sympa à voir:-)
J’ai beaucoup aimé Malacca également. Une ville qui mérite une visite d’une journée ou deux lors d’un périple en Malaisie péninsulaire.
Comme tu le dis, Malacca (et plus globalement la Malaisie) est un pays où des cultures très différentes vivent ensemble au quotidien, surtout que chinois/malais/indien ne sont pas loin d’être représentés à 30%/30%/30% 😉
oui et un pays agréable pour y vivre ou y passer quelques mois 🙂