Le secret pour toujours voyager vert
3Je baissai les yeux pour observer encore le bébé tortue qui s’agitait au creux de mes mains. Il regardait autour de lui, si petit et sans défense, sans doute déconcerté par ce nouveau point de vue sur le monde. Il venait d’être trouvé sur une plage protégée pour les tortues de mer en Turquie par une bande de touristes qui l’avaient bien tripoté avant que j’arrive à la rescousse et qu’ils ne se désintéressent de son sort.
On était à quelques pas de l’eau, mais il semblait désorienté. Seul sur la plage, il allait mourir, écrasé par la chaussure d’un touriste ou mangé par quelque chose de plus gros. J’avais déjà essayé deux fois de le mettre doucement dans l’eau, mais il n’arrivait pas à nager.
« Qu’est-ce que je dois faire ? » demandai-je, complètement paniquée, aux deux jeunes Turcs assis sur la plage. Ils me regardèrent avec un sourire moqueur et un air condescendant. « Tortue mort maintenant », me répondit l’un d’eux. En voyant mon expression horrifiée, un des jeunes Turcs se leva et versa un peu d’eau de sa bouteille en plastique sur la tortue. « Eau. Vie! » dit-il, son ami étouffant un petit rire.
Je le regardai, stupéfaite. Est-ce qu’il pensait que cet animal était une plante ? Je pouvais sentir la tortue miniature bouger dans mes mains, ses petites griffes chatouillant mes paumes. Elle ne pesait rien du tout et, pourtant, j’étais très consciente de sa présence, comme si elle était la chose la plus précieuse au monde à cet instant.
Je ramassai mon sac et marchai le long de la plage vers le village, demandant à la ronde où trouver les gens responsables de la protection de la plage. Je finis par trouver un beau jardin qui récupérait les animaux errants, où on me promit qu’on s’occuperait bien de ma tortue.
Parmi tous les gens à qui j’ai parlé ce jour là, en commençant par les deux Turcs sur la plage qui n’auraient pas levé le petit doigt pour cette tortue, un nombre incroyable d’entre eux ne se sentaient absolument pas concernés. Comment était-ce possible ? Si j’avais eu dans les mains une grosse araignée velue ou un vilain crabe, cela m’aurait moins surprise. Mais ce parfait, mignon bébé tortue ? Avec sa petite carapace, petits yeux, petites pattes… Comment est-ce possible de ne pas se battre pour sa survie ?
Comment est-ce possible d’avoir aussi peu d’amour dans son sac à dos ?
Je dis toujours que je « voyage vert », mais j’ai souvent l’impression que ce n’est pas vraiment le bon mot. Je ne choisis pas spécialement des destinations qui développent l’écotourisme, je n’ai jamais mis les pieds dans une écolodge, je ne paie pas pour compenser les émissions de dioxyde de carbone de mes vols.
Je ne sais pas s’il existe une définition adéquate pour la façon dont je voyage, mais il me semble que c’est ce que le « voyage vert » devrait être. Je suis la voyageuse qui aime. De façon inconditionnelle. J’aime les gens, j’aime les animaux, j’aime les arbres et tout ce qui vit sur notre planète.
J’aime tellement que l’inattention n’est pas acceptable
Pour être sûre que je ne fais de mal à personne, je m’informe à fond sur ma destination et sur les activités que je compte y pratiquer. Et, pour moi, c’est là que le bât blesse : car si je n’ai aucun doute sur ce que tout le monde est capable d’un peu d’amour, la majorité des voyageurs manquent complètement de curiosité.
Par exemple, j’ai du mal à croire que quelqu’un qui est courant de la façon dont sont traités les « éléphants à touristes » persisterait à pratiquer cette activité. Quand je suis moi-même allée au Népal, j’avais rassemblé plein d’informations sur le sujet avant mon départ. Sur mon chemin, j’ai rencontré trois personnes différentes qui avaient l’intention de faire des balades à dos d’éléphants. À chaque fois, il a suffi que j’expose mes informations en douceur pour leur faire complètement abandonner l’idée !
C’est vrai que ce qui marche avec des animaux aussi gros et beaux que des éléphants ne marche pas forcément dans tous les cas. Difficile parfois d’éprouver de l’empathie pour des petites bestioles qu’on n’a jamais vues (et, pourtant, il ne faut pas sortir du sentier en randonnée pour ne pas piétiner l’écosystème) ou encore pour des gens qui vivent de l’autre côté du monde (et pourtant ça serait bien de ne pas acheter des vêtements de voyage « made in Taïwan »), mais justement le voyage est là pour ouvrir l’esprit !
On se rend compte qu’on n’est pas si loin et pas si différents que ça…
Tout ça pour dire que voyager vert n’a rien de compliqué. Il ne s’agit pas de dormir dans une cabane au milieu de la forêt amazonienne ou de se passer de wifi ! Tu dois juste ouvrir un peu ton cœur et, grâce à ça, tu vas tout naturellement mettre ces quelques automatismes en place :
1. S’informer
Avec internet, il n’y a plus d’excuses aujourd’hui pour justifier le manque d’information. En quelques clics , c’est très facile de savoir si tel hôtel embauche des locaux ou si telle compagnie de safari permet de caresser des animaux drogués (si, ça se fait beaucoup, renseigne-toi). Avant même de débarquer dans un pays inconnu, tu dois déjà avoir la tête pleine d’informations.
Une autre source intarissable d’information, ce sont les locaux ! En quelques questions, tu sauras très rapidement si telle compagnie de bus refuse de transporter des locaux ou si tel « tour traditionnel » est authentique ou non.
2. Agir
Ca paraît évident, mais si tu as les informations et que tu n’agis pas dans le même sens, tout ça ne sert à rien. Mais j’ai envie de croire qu’un voyageur comme toi, avec un cœur humain et un cerveau qui fonctionne, mettra facilement ce conseil en pratique !
3. Ne pas fermer les yeux
Je sais que ce n’est pas facile. On est tous coupables d’avoir fermé les yeux à un moment ou à un autre, que ce soit en voyage ou à la maison. Mais il faut arrêter de se mettre la tête dans le sable et regarder le monde en face, car beaucoup de vies en dépendent.
Alors, oui, même si ça fait mal au cœur, même si ça veut dire que tu ne pourras jamais caresser un lionceau en Afrique, garde les yeux bien ouverts et ne recule pas devant les informations qui sont à ta portée ou les actions que tu es appelé à prendre. On a confiance en toi !
4. Partager
Une fois bien convaincu et bien informé, tu seras à même de partager ton expérience autour de toi et d’aider les autres à ouvrir les yeux. Que ce soit en discutant sur la route, en signant une pétition ou en partageant un article sur internet, c’est à chaque fois une ou deux personnes de plus qui apprennent à faire les bons choix, c’est pas merveilleux ?
Finalement, le secret pour toujours voyager vert et voyager responsable, c’est simplement d’avoir un peu d’empathie et d’amour dans son sac à dos. Alors, je t’en prie, pour tous les bébés tortues et même les araignées velues, pour toi-même et tous les êtres vivants sur terre, je t’en prie, voyage vert. Je t’en prie, aime.
A propos de Cora :
J’ai quitté mon travail et mon appartement parisien et commencé ma nouvelle vie de rêveuse/voyageuse. The Path She Took était né, et m’accompagne encore aujourd’hui dans mes premiers pas autour du monde et vers une vie plus verte ! Voyager vert c’est mon guide.
Et vous, avez-vous eu des expériences de voyager vert ? Partagez en commenatire !
Bonjour,
Voyager vert, c’est aussi et à la base choisir une façon de se déplacer qui soit la moins nuisible possible. C’est choisir sa façon de consommer, de se loger, d’explorer un nouveau pays… Voyager vert me semble tellement plus !
Sinon, je ne comprends pas l’utilité de mentionner la nationalité « turque » des personnes rencontrées ?
Merci
Bonjour Lise
C’est vrai voyager vert c’est bien plus et c’est ce qu’explique Cora dans son article: elle utilise cette expression pour insister sur la nécessité de voyager avec bienveillance. Enfin c’est ce qu’il me semble avoir compris;)
Concernant les jeunes turcs qu’elle mentionne c’est simplement parce que ce sont des locaux et qu’elle se tourne vers eux pensant qu’ils pourraient avoir une solution à lui apporter pour sauver cette tortue (a contrario des touristes… qui malheureusement ne firent preuve d’auc Bienveillance justement!)
Bonne journée ?
Vous nous donnez envie de partir.
Pour moi, limiter ses déplacements en avion ça me parait le début d’un voyage vert.